Oui, le jeune Ryusuke Hamaguchi, qui nous avait charmé à travers les épisodes de Senses, est bien le digne héritier d'Ozu.... Analyse psychologique fine comme une dentelle, petites touches comiques, importance du paysage rural ou, souvent, urbain... Asako I et II confirme cette première impression, même si le cinéaste étire parfois à l'excès les tempi de son récit. Petite coquetterie dont il devrait se méfier.
La ravissante Asako (Erika Karata), petite poupée de porcelaine dont on craint la fragilité, tombe amoureuse de Baku (Masahiro Higashide), look de beatnik, DJ occasionnel: quelques instants, et c'est le coup de foudre absolu. Les jeunes gens s'installent ensemble à Osaka, leur ville natale, partagent leurs amis. Mais Baku a tendance à disparaître. Il sort chercher le pain? Il revient le lendemain matin. Ou plusieurs semaines plus tard. Rassurant: de toutes façons, dit il à Asako, je reviendrai, je te retrouverai. Mais un jour, sorti acheter de nouvelles chaussures, il n'est jamais revenu.
Deux ans plus tard on retrouve Asako employée dans un café, à Tokyo. On devine que, dévastée par cet abandon, elle a laissé tomber ses études. Le café est fréquenté par les sémillants jeunes cadres d'une société d'exportation de saké, qui a ses bureaux à côté. Et, en Ryohei, Asako retrouve Baku, plus ressemblant que deux jumeaux monozygotes ne sauraient l'être... Mais différent: coiffure sage, costumes sombres et cravates: un jeune homme sérieux qui tombe éperdument amoureux, lui aussi, d'Asako. Elle se débat, cette ressemblance lui fait peur. Puis elle cède.... Mais aime t-elle Ryohei? Ou le clone de Baku?
Cinq ans plus tard, Asako et Ryohei mènent ensemble une petite vie tranquille, avec un bon gros chat. Ils partagent leurs amis...... ils vont retourner à Osaka, et se marier. Et c'est le moment que choisit Baku, devenu star de la pub et peut être bientôt du cinéma, pour revenir dans la vie d'Asako..... Ne lui avait-il pas dit qu'il reviendrait?
On pense à Ozu, mais plus encore peut être à Rohmer. Azako, dans ses incertitudes, est une belle héritière des jeunes filles rohmériennes..... Et la fin, aigre douce, aussi...
Je voudrais aussi saluer la performance de Masahiro Higashide. Avec trois fois rien, un regard profond, une moue cynique, il caractérise les personnalités différentes de l'honnête Ryohei et de l'égoïste, indifférent Raku.
A voir bien sûr!