Étudiante étrangère réservée, Bee accepte d'aller passer le weekend en compagnie des amis d'enfance de sa petite copine Sophie. Entre alcools, drogues et pics acerbes envoyés à la figure, le groupe de jeunes décide de faire une partie de "Bodies Bodies Bodies", une sorte du jeu du Loup-garou next gen, où un "tueur" doit se faufiler dans le noir pour toucher sa victime avant que les autres trouvent son corps afin de rallumer la lumière et identifier son assassin. Dans une maison luxueuse, isolée en pleine tempête et avec des invités de la sorte, inutile de dire que le jeu va très mal tourner...
Un slasher consacré pleinement aux affres de la génération Z et paré du sigle qualitatif A24, "Bodies Bodies Bodies" avait de quoi susciter la curiosité... Hélas, le film de Halina Reijn restera sans doute comme une des propositions d'horreur les plus anecdotiques distribuées par la firme à ce jour.
Les ambitions que l'on sent derrière ce projet ne sont pourtant pas dénuées d'intérêt, il y a vraiment quelque chose de pertinent à aller chercher cette part d'autodestruction chez les jeunes de cet âge, notamment cette fuite en avant dans les apparences mensongères et les paradis artificiels pour fuir la réalité, en vue de l'incarner littéralement dans un joyeux massacre où la confrontation à la vérité deviendrait synonyme de morts violentes. Et on ne peut pas reprocher à "Bodies Bodies Bodies" de trouver un bon moyen pour les concrétiser à partir de son jeu qui entre soudainement sur le terrain du réel.
Les remarques désobligeantes s'enchaînent, les masques derrière lesquels se cachaient les personnages se fendillent peu à peu, ceux qui essaient de s'y soustraire en fuyant la situation se mettent soudainement à se transformer en cadavres et ainsi de suite: "Bodies Bodies Bodies" prend la forme d'un perpétuel cycle de suspicions sur l'identité de son tueur, de vérités assénées et de nouveaux morts en attendant de lever le voile sur ce qui s'y trame vraiment.
Le problème c'est que, hormis deux ou trois saillies bien senties au sujet des classes sociales, le film se contente de jeunes personnages certes modernes mais pas très originaux, des sortes d'ersatz de la série "Euphoria" à l'écriture beaucoup moins inspirée que leurs modèles et qui peinent, de fait, à passionner par leurs petites remontrances balancées à autrui.
Comme "Bodies Bodies Bodies" passe énormément de temps à s'attarder sur la révélation de leurs vrais visages, le film s'enlise ainsi dans des séquences de bavardages de plus en plus futiles qui handicapent considérablement le peu de suspense qu'il peut y avoir autour de ses tenants et aboutissants de slasher (ici devenus de simples prétextes pas très généreux en la matière). Par ailleurs, si vous avez en plus vite compris où le discours voulait en venir (comme l'auteur de ces lignes), la conclusion du film ne pourra apparaitre au mieux que cohérente et logique avec tout ce qui avait été mis en place pour la construire, aucun effet de surprise pensé dans le but de la rendre un tant soit peu marquante ne viendra contredire le résultat finalement assez transparent de l'entreprise.
On remerciera tout de même le casting convaincant, composé de plus ou moins jeunes pousses de talents (Amandla Stenberg, Maria Bakalova, Rachel Sennott, Pete Davidson ou Lee Pace entre autres), ainsi que la réalisation dynamique de Halina Reijn, d'avoir réussi à rendre cette partie de "Bodies Bodies Bodies" pas trop déplaisante à suivre dans son ensemble mais le film ne restera clairement pas comme le slasher incontournable de la génération Z qu'il se rêvait sûrement d'être.