"Grâce à Dieu" est une plaidoirie, à charge contre l'église et ses prêtres pédophiles. Accusateur, oui, mais pas que. Car il construit méthodiquement son discours en trois points de vue, par le biais de 3 personnages (ou 3 parties) assez distinctes, qui se côtoient, se confrontent et se complètent. Autant de vies, de traumatismes et de façons de les surmonter. Mais la conclusion reste la même, implacable, meurtrie par les conséquences des actes odieux et le silence absolu que l'Eglise tente par tous les moyens de conserver. C'est donc entre le dégout des témoignages évoqués et le mutisme total des serviteurs et des représentants d'une religion qui prêche la vertu (sélective) à défaut de la vérité qui dérange, F.Ozon s'empare d'un sujet d'actualité où le tabou a bon dos pour étouffer l'horreur, et la lumière des Cieux aveuglante pour ceux qui tentent de la percer au grand jour. Et même si le réalisateur à un regard inquisiteur et accusateur, difficile pour la "défense" de pouvoir justifier les actes, les secrets et les mensonges. Pour autant, même si le film est poignant et révoltant, la réalisation est plutôt sobre et le scénario ne joue pas de rebondissements "coup-de-poing" ou tape-à-l'oeil, la trame choisie par le réalisateur s'appuie sur des témoignages multiples, du concret, caméra au plus près du quotidien de ses protagonistes. Sans jamais tombé dans l'aspect documentaire, jouant pleinement des codes de la fiction. Il fallait 3 acteurs aux facettes bien différentes pour rendre crédible ses personnages, et le trio M.Poupaud, D.Ménochet, S.Arlaud répond parfaitement au(x) ton(s) souhaité(s) par le parti-pris scénaristique. Même si le film se perd un peu dans une certaine redondance vers sa fin et une certaine forme académique par moment, il instruit beaucoup sur ces affaires dont on aperçoit le sommet d'un iceberg, et dont on redoute la profondeur de la partie immergée. Où on reste outré par les silences: celui qui combat la vérité, celui qui fait consumer le traumatisme à l'intérieur des victimes, et celui qui prédomine quand publiquement il faut en parler. "Grâce à Dieu“ a décidé avec sa forme assez sage et rigoureuse d'exposer les faits. L'évidence fera le reste.