Dotée d’une approche aussi loufoque que marrante pour ne pas dire saugrenue, la bande-annonce laissait augurer quelque chose de grandiose, d’épique. D’autant que le public a déjà connu par le passé une association Boyle/Patel pour quelque chose… d’effectivement grandiose et épique. C’était en 2008 (sortie en France en janvier 2009… eh oui déjà), et Dev Patel travaillait sous les ordres de Danny Boyle sur un sujet traité avec une véracité profonde qui a touché les cœurs et marqué durablement les esprits. Cette fois, Boyle a dirigé non pas Dev mais Himesh Patel (a priori sans lien de parenté) sur un scénario qui aurait pu bénéficier de la véracité si chère au réalisateur s’il n’avait pas été teinté de fantastique. Et donc ? Eh bien le spectacle ne s’avère pas aussi grandiose et épique comme le public pouvait s’y attendre. Du coup, bien que bénéficiant d’une note tout à fait honorable, on ressent une certaine déception au sein des spectateurs tout en sachant qu’ils ont malgré tout vu un bon film. C’est justement pour me mettre à l’abri de cette déception héritée d’une idée toute faite avant visionnage que je ne regarde jamais les bandes-annonces. Mais que voulez-vous ? Quand on va au cinéma, certaines d’entre elles deviennent inévitables. Aussi mieux vaut porter un jugement sur ce film après avoir digéré cette désagréable sensation de légère déception avec laquelle on sort de la salle. Et c’est à partir de ce moment qu’on peut parler de ce film avec beaucoup plus de justesse. Alors on reconnaîtra une originalité, bien qu’on trouve ce style de petite patte fantastique dans quelques films. Le premier qui me vient à l’esprit est "Ce que veulent les femmes" avec Mel Gibson (2001). Sauf qu’ici, ça touche la musique, et pas n’importe quelle musique : celle des quatre enfants chéris de Liverpool, j’ai nommé les Beatles !!! Imaginez un monde sans avoir connu les Beatles, et quelques produits phares qui inondent notre visuel quotidien ! Certes on vivrait sans très facilement, mais pour les avoir connus, ça semble impossible ! Question véracité du récit, elle a réussi à survivre à cette petite dose de fantastique grâce aux très bonnes prestations de Lili James et Himesh Patel, tout simplement parce qu’on les sent pleinement concernés. La première prête ses traits à Ellie Appleton, et on sent bien qu’elle a mis dans son rôle tout son cœur et tout son talent de jeu d’actrice. Son expression scénique est si expressive que le public comprend très vite que son personnage éprouve quelque chose qui va au-delà de l’amitié envers Jack Malik. Quant à Himesh Patel, qui sait ambiancer une salle de spectacle en faisant participer l’arène, on ressent bien l’admiration qu’il a envers le célébrissime quatuor, au point de mettre à contribution son opportunisme pour réparer cet oubli et faire à nouveau passer dans la postérité les tubes anglais, ce qui d’ailleurs pose un sacré problème d’éthique ! Heureusement, la morale sera sauve. Mais bon sang, qu’on a envie de secouer Jack quand il est avec son admiratrice et son amie de toujours ! Parce que nous aussi on sent bien qu’il en pince pour elle bien que ce soit moins flagrant. Il est tellement naïf, tellement obnubilé par son miracle rêvé, qu’il ne s’aperçoit pas que ses doux sentiments sont réciproques. Et tant qu’à faire, envoyons au diable Debra Hammer, cette manageuse sans cœur jouée par une excellente Kate McKinnon qui a réussi à réunir tous les clichés de ces hommes-femmes d’affaires dont la seule éthique consistant au remplissage de leur porte-feuille et à la gloire fait qu’ils ne reculent devant rien, pas même devant des paroles assassines y compris auprès des parents de son poulain. Et j’avoue avoir pris un plaisir immense à la voir se faire envoyer sur les roses avant de se faire passer en victime. Succulent ! Il n’y a pas à dire, quand on parle de "Yesterday", on s’apercevra que ce personnage est aussi resté en mémoire, tout comme Ed Sheeran dans son propre rôle mais dans une moindre mesure, quoique surprenant par sa capacité d'autodérision. Par contre, j’aurai aimé avoir plus de confrontations entre Ed et Jack, comme par exemple davantage de séquences de travail en commun et pourquoi pas un ou deux duos. Ah oui pardon : ce sont les chansons des Beatles qui doivent être chantées et uniquement celles-là. A côté de ça, la romance est très mignonne sans toutefois parvenir aux sommets atteints par "A star is born". Alors quand je vois que LCI ose dire que "Yesterday" est aussi touchant que "Slumdog millionnaire", ce n’est pas vrai. En tout cas pas autant. Sinon le rythme est bon, si bon que les presque deux heures passent sans aucun ennui. Pourtant le film n’est pas parfait, notamment en ce qui concerne le personnage de Rocky. Son interprète est très bon car lui aussi a réuni tous les plus grands clichés du looser qui se croit toujours drôle grâce à sa super intelligence. En réalité, ce que son personnage est gonflant ! Il est lourd, pas drôle, et creux comme pas permis mais bon j'imagine que son personnage était nécessaire. Par contre, après avoir vu le film, visionnez et/ou revisionnez la bande-annonce : l’oubli ne se limite pas aux Beatles ou à une célèbre marque de soda (entre autres), mais aussi à des plans que nous ne retrouvons pas dans le film. Attention, ce soudain oubli semble contagieux ! Une chose reste cependant sûre : "All you need is love" ! Et ça, nous ne sommes pas prêts de l’oublier parce que c’est notre nature. Enfin, pour couronner le tout, on ressort de la salle avec en tête certains refrains particulièrement entraînants. Il ne manque qu’une chose selon moi : une petite chorégraphie avec l’ensemble du casting pour accompagner le générique de fin, tout comme Boyle l’avait fait à l’occasion de "Slumdog millionnaire".