Et si les Beatles n'existaient pas ? Une bien triste perspective imaginée avec tendresse et humour par Danny Boyle et Richard Curtis, même s'il y a peu de doutes que la relative réussite de l'entreprise soit surtout due au second, tant le réalisateur de « Trainspotting » apparaît bien sage, presque effacé. Sur une trame rappelant légèrement celle de « Jean-Philippe » tout en traçant son chemin avec savoir-faire, « Yesterday » assume avec fraîcheur sa dimension « feel god movie », l'écriture soignée comme la sympathie que nous avons pour les personnages étant quasi-immédiate. Dommage, comme souvent avec Curtis, que ce dernier cède trop souvent à une forme de gentillesse, voire de mièvrerie, dans le regard qu'il porte à sa romance comme à l'industrie musicale, offrant certes de jolis moments, mais aussi un certain manichéisme incarné par la puissante productrice (ce qui n'empêche nullement certains passages assez drôles). En revanche, sous ses airs parfois (un peu trop) modestes, et même s'il eut sans doute été intéressant de plus les développer, le film soulève plusieurs questions stimulantes
(les Beatles auraient-ils la même aura s'ils se formaient aujourd'hui ? Peut-on plagier un groupe n'existant pas ? Certains de leurs textes ne seraient-ils pas modernisés pour le public d'aujourd'hui? N'était-il pas préférable que John Lennon ne devienne jamais l'icône qu'il est devenu mais évite ainsi son assassinat ?)
, offrant à chacune de possibles réponses plutôt convaincantes. Il y a quelque chose d'assez touchant à voir toutes ces personnes découvrir « en direct » l'un des plus grands groupes de l'Histoire de la musique, mais sous un jour différent, par un chanteur et guitariste talentueux (sans être exceptionnel), interprété par le charmant Himesh Patel, secondé par la non moins charmante Lily James, sans oublier, comédie anglaise oblige, le soin apporté aux seconds rôles (les parent de Jack en tête, sans oublier Ed Sheeran, dont la présence offre un éclairage intéressant sur le regard que l'on peut avoir sur ces titres aujourd'hui). Et de rappeler, si besoin était, que les Beatles, c'était vraiment un groupe génial, une véritable machine à tubes plus inoubliables les uns que les autres qu'on prend un plaisir fou à réentendre ici, même réinterprétés. Cela aurait été encore mieux sans une fin nian-nian à souhait, pour ce qui reste un des bons moments de cinéma vécus en 2019.