Le réalisateur revient cette année avec un film moins ambitieux, moins événementiel car ne brandissant ni grand concept comme programme (l'amour dans Love, la mort dans Enter the void) ni scénario vraiment développé.
Or, Climax, aussi modeste et anecdotique qu'il soit sur le papier (il a été tourné en 15 jours seulement), est un énorme morceau de cinoche, bien plus riche que le vide scénaristique que laisse entendre le script de deux lignes. En effet, je ne peux nier la faiblesse du script qui se résume grosso modo à une fête de danseurs qui finit très mal. Et pourtant, cette épure scénaristique permet à Noé d'étoffer son discours, qui passe essentiellement par l'image, sur la jeunesse, la drogue... Noé refuse toute littérature pour se concentrer sur les corps. C'est d'ailleurs sur ce point qu'on peut lui reprocher des défauts : les scènes avec le plus de dialogue sont les moins réussies, les moins intrigantes, les moins fascinantes. En effet, durant deux scènes où les personnages apparaissent face caméra, on entend des banalités sur la danse, le sexe opposé, la sexualité, l'amour, l'espoir, les rêves. Ces scènes sont inutilement longues et cassent le rythme du film, faisant retomber un souffle et une ambiance des plus spéciaux. Non seulement, ces dialogues sont d'une vulgarité et d'une vacuité sans nom, mais ils sont aussi une offense à la jeunesse et aux artistes.
Néanmoins, ces deux scènes permettent de présenter les personnages de manière équitable tandis que la seconde inaugure un malaise, une gêne qui iront crescendo jusqu'à la fin. En effet, Noé laisse paraître la libido démesurée de tous les danseurs, désinhibée par l'alcool et la drogue, à travers leurs mots crus et leurs pensées malsaines. Noé orchestre ensuite avec une maestria exceptionnelle la lente mais brutale et tragique fièvre qui prend possession des personnages. Par strates, le réalisateur filme la folie provoquée par l'alcool et la drogue de manière juste car justement il se concentre sur le caractère progressif de la chose. Le réalisateur opère brillamment les passages de la danse à la transe, de la danse professionnelle à la danse perverse, de la danse collective à celle plus solitaire. A travers cette troupe de danseurs, il capte les angoisses de notre époque, devrais-je dire de toutes les époques : la peur de l'autre, de la différence.
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