Chronique adolescente sans inspiration
Après son Hospitalité de 2010 que l’on vient de découvrir, on continue de fouiller dans le passé cinématographique de Kôji Fukada… Voici donc un film de 2019 qui précède de peu celui qui l’a fait connaître et reconnaître en Occident, L’harmonium. Aussi, quelle déception à l’issue de ces 89 minutes d’un ennui profond, qui louchent – mais en ratant leur cible – sir le cinéma fantastique. En quête de ses racines, Sachiko rend visite à sa famille japonaise installée à Sumatra. Tout le monde ici essaie de se reconstruire après le tsunami qui a ravagé l’île il y a dix ans. A son arrivée, Sachiko apprend qu'un homme mystérieux a été retrouvé sur la plage, vivant. Le village est à la fois inquiet et fasciné par le comportement de cet étranger rejeté par les vagues. Sachiko, elle, semble le comprendre… A part les paysages envoûtants de l’Indonésie, pas grand-chose à sauver de ce pensum indigeste. Bref à la sortie, il n’y a pas que les vagues qui soupirent.
Laut, le nom donné à « l’homme de la mer » qui surgit de nulle part pour semer le trouble, signifie "mer/océan" en indonésien. Au sujet de ce personnage, le réalisateur déclare : Il n’a pas été facile de définir ce personnage, de le positionner. J’imaginais combien des spectateurs auraient du mal à cerner un homme qui peut donner la vie comme la reprendre. J’ai finalement pensé qu’il fallait l’abstraire du langage, laissant le spectateur à son imagination. Qu’il se rassure, mission accomplie ! Cette figure quasi messianique est plus dérangeante que mystérieuse, car, même si les religions sont une manière de s'arranger avec ce qui échappe à notre compréhension, à notre contrôle, je n’ai pas réussi à voir dans ce personnage, une passerelle vers la croyance, comme le prétend le réalisateur. « L’intrusion d’un inconnu » semble être un thème récurent chez Fukada, mais, autant dans Hospitalité ou Harmonium, c’était une réussite, autant, cette fois, c’est bien raté. La qualité des images n’y fait rien. Grosse déception !
Même constat au niveau de l’interprétation pour le moins empruntée des Dean Fujioka, Taiga, Junko Abe, et consorts – comme on dit en indonésien -, qui rend ce film interminable. Cette fois, Fukada n’a pas réussi à donner la moindre consistance à ses personnages, c’est est embarrassant. On finit par se demander ce qu’ils pensent, quels sont leurs vrais sentiments, leur réalité même. Du fantastique sans zombies mais avec ectoplasmes qui semblent traverser la vie sans s’en apercevoir, sans avoir la moindre action sur le réel. Ça ne marche pas et l’ennui discret d’abord, puis de légers baîllements avant de sournois endormissements vous gâchent allègrement votre séance. On annonce pour 2022 la sortie d’un diptyque sur l'amour Fuis moi, je te suis / Suis moi, je te fuis de ce même réalisateur… je ne sais même plus si je dois m’en réjouir.