Les difficultés de réinsertion quand on sort de prison, Nathan Ambrosioni, le réalisateur des « Drapeaux de papier », les a remarquablement intégrées dans la construction du récit qu’il a imaginé et mis en scène. Lorsque Vincent (Guillaume Gouix) retrouve la liberté, il a derrière lui 12 années d’incarcération. Il a tout à redécouvrir, tout à réapprendre et, pour ce faire, il compte sur le soutien de sa sœur Charlie (Noémie Merlant). Quand cette dernière le voit réapparaître, elle accepte, presque malgré elle, de l’héberger, sachant bien qu’il n’a pas d’autre solution. La cohabitation, évidemment, ne sera pas toujours au beau fixe. Même si elle rêve d’être une artiste et de vivre de ses talents de dessinatrice, la réalité de l’existence de Charlie s’avère beaucoup plus prosaïque : elle est caissière dans un supermarché et se bat au quotidien avec ses difficultés financières. Elle exige donc de Vincent qu’il se trouve un emploi. Ce qui pose à celui-ci un dilemme : faut-il avouer la vérité ou s’efforcer de mentir ? Quel employeur donnera sa chance à un homme qui sort de prison ?
Pour compliquer encore la situation, il s’avère que Vincent est sujet à des troubles du comportement qui peuvent se manifester par des accès de violence. Et les entretiens avec une psychologue, qui lui ont été prescrits, ne suffisent pas nécessairement à les canaliser. Et puis, il y a la figure du père. Un père qui a renié son fils et qui apparaît, cependant, sans se douter qu’il sera en présence de ce dernier. La scène qui réunit Charlie, Vincent et leur père autour d’une même table est particulièrement intense, émotionnellement très forte et spécialement bien dirigée : tout y converge sur une question de regard (ou de son refus).
Cela dit, de grandes qualités de mise en scène sont également présentes tout au long du film. Nathan Ambrosioni a judicieusement choisi de privilégier les gros plans, ce qui, dans une histoire telle que celle-ci, qui fait la part belle à deux personnages, à leurs émotions respectives, convient à merveille. Quant aux performances des deux interprètes principaux, elles méritent tous les éloges. Guillaume Gouix incarne parfaitement un personnage à la fois fragile, déboussolé et capable de soudaines poussées de violence. Quant à Noémie Merlant, dont le talent ne cesse de s’épanouir de film en film, elle donne à son personnage une extraordinaire densité. Autant de savoir-faire conjugués apportent au film une formidable crédibilité.