Après avoir mis en scène un conflit israélo-palestinien dans « Bethléem », Yuval Adler vient se rattacher à ce thème, tout en ouvrant sur de nouvelles frontières, avec une grande touche réaliste. En adaptant « The English Teacher », écrit par Yiftach Reicher Atir, ex-agent du renseignement israélien, le réalisateur y trouve une sorte d’exploration humaine dans le métier d’espion. Toutefois, l’approche est sans doute trop littéraire pour qu’on puisse se concentrer sur l’essence du récit. On a beau s’inspirer de faits réels, l’étude psychologique d’une femme de terrain n’est pas toujours bien traitée, en symbiose avec ses angoisses.
C’est tout de même un plaisir de retrouver Diane Kruger dans un rôle complexe et qui sait comment nous inviter à l’empathie. Mais ce qu’il y a de surprenant dans le personnage de Rachel, c’est son masque. Sans attache, elle est en perpétuelle crise identitaire. Étant l’intermédiaire parfait pour le Mossad, l’agent double joue gros en prenant des initiatives qui la rapprochent peu à peu de son humanité. Elle le porte toujours ce masque, car elle est formée ainsi. Devant son collègue, ou parfois devant son officier traitant, mais ce qui importe, c’est qu’elle puisse profiter d’une nouvelle relation, loin des radars pour enfin se libérer. En territoire ennemi, il faut savoir rendre des comptes à l’environnement hostile pour l’apprivoiser, avant de faire état des lieux pour l’objectif premier. Elle jongle constamment entre vie professionnelle et privée, alors qu’elle baigne dans une routine truffée de mines.
Gardons malgré tout une once de sympathie, côté travail, avec Thomas Hirsch (Martin Freeman) comme correspondant favori et confident direct pour les moments difficiles. Ce personnage ramène néanmoins Rachel à l’état d’embryon, car il ne symbolique que l’espoir et les promesses d’une vie, presque antérieure. Il fallait donc un second étalon pour former une trinité ambiguë, mais complexe. Avec Farhad (Cas Anvar), c’est quitte ou double. Rachel s’épanouit mieux en sa présence, lui offrant ainsi l’opportunité d’enlever une partie de son masque. Mais le mensonge est comme une deuxième nature. Elle s’en sort mieux en l’utilisant, car l’honnêteté peut s’avérer être un poison dans ce métier. Par exemple, une mission de transport qui n’ampute aucune tension. C’est plutôt l’angoisse générée qui justifie les choix de l’espionne, talentueuse, crédible mais torturée.
Coopérer ou mourir, c’est moins James Bond que ça en a l’air. Ce sera plus de la cascade psychologique qu’autre chose. Malheureusement, on se perd facilement, car on souhaite nous emmener à différents points, en laissant traîner trop de sous-intrigues en suspens. Cela aurait dû alimenter la tension et la crainte du personnage, mais les va-et-vient entre Rachel et Berlin désamorcent souvent l’ambiance, pour nous laisser respirer. Le début de l’intrigue tient cependant sa part du contrat. Dommage « The Operative » ne reste pas efficace jusqu’au bout, car il reste du chemin à faire pour rendre cette aventure plus réaliste.