Si les manoirs victoriens sont de formidables révélateurs des lignes de fracture de la cellule familiale, ils sont plus souvent employés dans des productions teintées de surnaturel que dans des chroniques cartésiennes des excès d’un autre époque, en l'occurrence l’aube des années 80. Un yuppie retourne dans son Angleterre natale avec femme et enfants, convaincu que c’est là qu’il pourra révéler son plein potentiel. Entre les difficultés d’adaptation sociale des enfants, le sentiment grandissant d'incomplétude de son épouse et ses propres échecs professionnels, rien ne va pas se dérouler comme il l’espérait S’il faut reconnaître une grande qualité à ‘The nest’, c’est d’avoir fait de la bâtisse, implicitement, l’écrin idéal pour illustrer la dérive d’un homme dont les convictions et les certitudes se heurtent à la réalité toute simple de ses propres limites, dans un ère où le paraître parvient parfois à remplacer les compétences. Vivre au-dessus de ses moyens dans l’espoir, justement, de pouvoir parvenir un jour réellement à ce niveau de richesse, c’est le piège destructeur dans lequel va tomber Rory, trop obnubilé par cette réussite qui lui semble à portée de main et lui permettre de prendre sa revanche sur ses origines, pour se préoccuper du naufrage de ses proches. La caméra passe ainsi de plans larges et apaisés à un cadre de plus en plus resserré à mesure que l’atmosphère familiale devient étouffante. Curieusement, on pense beaucoup à un autre film récent dont ‘The nest’, malgré des qualités certaines, n’atteint pas tout à fait le niveau d'excellence: l’prouvant ‘Pieces of a woman’ de Kornel Mundruczo. Comme dans ce dernier, le trait souffre parfois d’une certaine surenchère, tout comme les métaphores qui illustrent la remontée toxique de ces non-dits et de ces secrets qui rongent les fondations de la vie rêvée des O’Hara...et comme dans la production Netflix, c’est une actrice que je ne connaissais personnellement pas, Carrie Coon, de moins en moins prête à sacrifier ce qui compte réellement pour elle dans le but de satisfaire l’orgueil de son mari, qui se révèle être l’aimant qui finira par attirer tous les regards, grâce à la force silencieuse qu’elle dissimule derrière les bonnes manières d’une supposée épouse choyée, et qui finira par tout emporter sur son passage.