Diao Yinan, la cinquantaine, est un des quelques réalisateurs chinois dont les films parviennent à concourir dans les Festivals, et sont projetés sur les écrans des salles françaises. Son dernier long métrage, en compétition à Cannes, « le Lac aux oies sauvages » est un polar, tout ce qu’il y a de polar. Flics contre truands, meurtres, sang qui coule, on, n’est pas avare en hémoglobine, et au final, ce sont évidemment les flics qui gagnent. Mais il s’agit pour nous autre occidentaux, de déchiffrer ce qui se cache derrière le polar, car on sait bien qu’un film dénonçant crûment le régime n’aurait aucune chance d’être tourné. Quant à nous parvenir, mieux vaut ne pas y penser !
Un gang est réuni, le chef distribue les rues dont chacun aura la charge de ramener de l’argent. Les désaccords naissent, les coups pleuvent, un coup de feu claque. Les morts vont s’enchaîner jusqu’à ce qu’un flic soit tué. Le meurtrier est alors pourchassé. Mais une jeune femme, à l’allure androgyne, rôde autour du tueur de flic, sans qu’on sache vraiment qui l’envoie. Le chef du gang, la police ? à moins qu’elle agisse pour son propre compte, on ne sait.
Quand je parlais de décoder la pensée de Diao Yinan, il apparaît qu’entre flics et truands, la différence est celle du papier à cigarette, on les confond parfois à l’écran. Sans doute, le réalisateur mêle les uns et les autres dans un vaste marécage, terminé par la photo souvenir des flics triomphant sur le corps criblé de balles de celui qu’ils poursuivaient. Entre les uns et les autres, difficile de faire la part des bons et des méchants.
On retiendra néanmoins deux choses : la jolie Gwei Lun Mei, androgyne, qui livre une superbe composition dans le rôle de cette femme mystérieuse à souhait, et au final ou presque, le repas de pâtes et la façon dont Hu Ge, celui qui a tué un flic, mange ses bols de pâtes : ouvrez grand vos oreilles, c’est délicieux, enfin selon les goûts de chacun, je parle du bruit, mais aussi des pâtes sans doute ! Enfin, Diao Yinan nous plonge dans ces quartiers chinois où la misère rôde, petits métiers, là où chacun survit en espérant que flics et truands ne viendront pas régler leurs comptes. Sinon, le film regorge de scènes, tournées dans la pénombre, où les lumières jaillissent, ainsi que les coups de revolver qui font sursauter acteurs et spectateurs. Mais rien de très neuf côté polar !