Et si la féminité se résumait à une apparence, se réduisait à la plus futile des existences ? «Some like it hot» (USA, 1959) de Billy Wilder interroge la place de la femme dans le monde, par le truchement du film noir et de la comédie. Genres, dans cette période hollywoodienne, quasi-exclusivement occupés par la gent masculine, ils se trouvent imbriqués dans la même narration, se jalonnant par alternance pour stimuler les aventures du trio comique. Fuyant un syndicat du crime, le duo de musiciens Joe et Jerry sont obligés de se costumer en femme et d’en adopter le comportement pour pouvoir partir en Floride dans un orchestre exclusivement féminin. La figure de la femme, outre de ridiculiser des hommes contraints au travestissement, devient un lieu de sûreté, un outil de leurre pour échapper à la brutalité des hommes. L’autre femme du film (et quelle femme !) dispose du corps, de la voix délicate et de l’innocence du jeu de Marilyn Monroe. Dupée, elle côtoie la forme féminine de Joe et sa forme masculine. Désireux de sortir avec elle, le personnage de Tony Curtis joue un double jeu pour séduire la belle femme, la considérant comme stupide et crédule. Wilder est sévère avec ses personnages, il les soumet à une agitation perpétuelle qui, au lieu de les servir, les transforme en pantins ridicules, assujettis à la pauvre facilité des hommes et des femmes. Quand, dans la séquence finale, Jerry révèle au milliardaire infantile tombé sous son charme qu’il est un homme, celui-ci lui répond : «Nobody’s perfect !». De ne pas être une femme, Jerry se révèle quelque peu imparfait. Wilder fait de la femme une figure parfaite, du fait qu’elle soit celle qui, après la tempête, réussisse seule à survivre. Dans le bateau final qui fuit, demeurent un ancien travesti, une femme plantureuse, un riche efféminé et un homme-femme. Le cynisme légendaire de Wilder s’attarde sur les hommes qui se réduisent au vulgat du crime sans épargner la stérile négligence des femmes.