« Play » est sans aucun doute le reflet d’une génération, celle des années 80, et à ce titre, ce film sous forme de montage vidéo, associant VHS puis numérique, en est finalement particulièrement révélateur !
On pourra assurément s’y reconnaître et trouver cette démarche originale et géniale (!), surtout en tant que trentenaire ou presque quadra, mais pour un sexagénaire et donc « parent » de cette génération, le constat est un peu plus amer sur le fond, dans la mesure où l’ensemble de ces vidéos bien trop réaliste et représentatif, est inquiétant en terme de bilan...
En effet, quand on considère toutes ces années filmées par l’œil de cette caméra, telle une mémoire de la vie passée, on ne peut que quand même rester sur sa faim quant au tableau qui nous est brossé, si on considère l’enjeu véritable des dialogues, ainsi que la profondeur réelle de ces relations basées sur la fête, l’alcool et le désir de sexe.
Et donc en se demandant ce qui lie vraiment ces êtres entre eux et ce qui explique leur amitié...
À aucun moment dans ces archives, ne surgit la moindre allusion à la politique, le moindre avis sur l’état de notre société, sur le devenir de l’humanité pourtant en mauvaise passe depuis longtemps...
Où est passé ici la soif d’idéal, l’éveil à la conscience, la prise de position face au monde qui nous entoure, la mobilisation personnelle et la participation aux luttes sociales, ou juste le besoin et la nécessité d’être utile aux autres ?
Ici, rien de tout cela n’est évoqué, pas un moindre iota sur cet aspect primordial de l’existence, réduit au silence le plus total. Sidérant !
De même que dans ce témoignage, on se rend compte que personne ne fait part de ses aspirations ou projets personnels, ou si peu...
On a le sentiment d’assister à 25 ans uniquement vécus à travers des instants creux et superficiels, faits de petits riens sans doute, drôles ou pas, mais seulement de petits riens et que de petits riens !
Certes c’est peut-être sympathique et léger à découvrir, avec un Max Boublil en forme ou presque, et on pourra y prendre du plaisir en s’identifiant pour la plupart de cette génération, mais si on creuse un peu, c’est aussi très inquiétant de réaliser à travers ces images, ce vide absolu quant à l’absence totale de la moindre discussion ou réflexion à propos de l’Humanité !
Aucun engagement, aucune prise de position n’y apparaît jamais.
On reste donc sur une peinture bien édifiante d’une génération trop centrée sur elle-même, qui semble surfer uniquement sur le plaisir au jour le jour, sans qu’à aucun moment la véritable flamme ou la moindre passion n’apparaisse, celle qui fait grandir l’Homme, celle qui fait bouger les montagnes, celle qui bat le pavé, celle qui lutte contre les injustices, et donc celle qu’on attend encore et surtout plus que jamais actuellement, pour être aux côtés des plus « anciens » dans la rue, afin d’espérer une démocratie juste et équitable pour tous.
Sans doute, une bonne idée plutôt originale de la part de Anthony Marciano. Mais indirectement un constat très limité, au message plutôt consternant qui met en évidence un manque de questionnement et d’ambition conduisant à une immobilité générale qui fait craindre le pire, et par conséquent un film qui donne envie de crier : « Réveillez-vous avant qu’il ne soit trop tard ! » à toute cette classe d’âge, car si la touche « Play » est toujours enfoncée pour tous quoiqu’il arrive, la touche « Rewind », elle, ne fonctionnera pas...