Incroyable bonne surprise pour ce film qui hélas n'aura pas pu connaître une carrière en salle digne de ce nom avec sans aucun doute un bouche à oreilles qui l'aurait propulsé vers des sommets mais c'est le lot du cinéma de fin 2019 et 2020 avec cet arrêt mondial du au covid. On a là un film palpitant, prenant, film puzzle à énigme, une sorte d'Agatha Christie et ses 10 petits nègres ou son crime de l'orient express d'autant que le lieu clos ou le huit clos est de la partie. Le milieu déjà est intéressant, celui de l'édition, mais pas celui des artisans et auteurs à découvrir, non celui des Best seller et des stars de l'édition quasiment cotés en bourse. Le troisième et dernier tome du succès mondial Dedalus doit sortir. Ce phénomène de l'édition avec son auteur inconnu sauf de son patron éditeur interprété avec brio par Lambert Wilson. Un numéro grandiose qui n'est pas sans rappeler sa prestation dans Matrix par sa mégalomanie, son assurance en y ajoutant ici son machiavélisme, sa venalité, son dédain et irrespect des autres qu'il traite comme du bétail. Il organise dans un lieu clos, sorte de bunker soviétique sous un manoir, la traduction simultanée en toutes les langues d'édition du précieux manuscrit en enfermant avec leur volonté initiale 8 traducteurs qui n'auront aucun contact extérieur pendant plusieurs mois. Le but sortir le livre dans le monde entier en même temps sans qu'aucune ligne n'ai pu fuiter. Le décor et les gardes, véritables caricatures d'agents brutaux du KGB, constituent un environnement incroyable, un personnage à lui seul tout en incluant un certain confort avec chambres privatives, bar, piscine, bowling, et bien sûr salle de travail où tous doivent travailler de concert par lots de 20 pages sans rien connaître de la suite et sans garder aucune trace. Autre particularité du film, ce milieu rarement visité au cinéma des traducteurs et la découverte de leur rôle et influence sur l'œuvre que nous lisons finalement, leur traduction étant une forme de réécriture, d'adaptation de l'œuvre originale, chacun s'appropriant le texte et les personnages à sa façon et non en faisant du mot à mot ce qui serait impossible du fait des différences de sens, de richesse des langues et de la culture qu'elles véhiculent. Le film fonctionne comme une prise d'otage dans une prison dorée avec des interactions plus ou moins faciles et agréables entre les uns et les autres jusqu'au départ de la partie thriller quand l'éditeur malgré toutes ces précautions, reçoit une demande de chantage sous peine de dévoiler au monde entier le livre par morceaux. Commence alors une situation chaotique et tendue, qui part complètement en live, incontrôlable, avec recherche de la taupe, du traître et de la suspicion qui glisse de l'un à l'autre avec une montée en puissance de la violence et des méthodes totalement illégales de la part de Lambert Wilson, en lien avec son grand groupe et sous pression par la hauteur des sommes d'argent mises en jeu. Enquête, révélations, faux semblants, coups de théâtre, le film accélérera son rythme nous surprenant sans arrêt, nous emportant dans de fausses directions, avec des tiroirs qui se ferment et de nouveaux qui s'ouvrent, une sorte de film puzzle genre poupées russes sans fin. L'utilisation équilibrée de flash backs, de scènes même dans le futur, éclaire peu à peu la machination géniale et presque perverse de celui ou celle qui tire les ficelles avec à la toute fin la reconstitution totale de l'intrigue et nombre de surprises. Hors Lambert Wilson la prestation d'Alex Lawter est remarquable et comme toujours Olga Kurylenko apporte son charme, sa classe, son charisme et ses émotions à son personnage qui ne peut que ressortir du lot sans pourtant être un pion essentiel. Un très grand film, film thriller passionnant à tiroirs, habilement mené et réalisé, avec un rythme qui monte en puissance et en tension. A voir absolument et qui fait honneur au cinéma français qui hélas dans sa production féconde ne propose pas que des perles, loin de là.