Après quelques séances un peu dures, voire assez lourdes émotionnellement, j’avais vraiment envie d’une petite comédie sans prétention, légère comme un bulle de champagne. Comme j’avais beaucoup aimé « La Vache », le précédent film de Mohamed Hamidi, et que je fais confiance à Gilles Lellouche et à Malik Bentalha en général (d’ailleurs, je vais le voir sur scène dans quelques jours !), c’est « Jusqu’ici tout va bien » que j’ai choisi. Forcément, devant un sujet comme « les bobos parisiens découvrent la Courneuve », le craindre était à redouter en termes d’humour facile, de clichés et de scénario cousu de fil blanc. Et bien, même si le film de Hamidi coche toutes les cases et n’a pas l’originalité et la poésie de « La Vache », il n’est pas si convenu qu’il aurait pu l’être. Côté réalisation, c’est bien tenu, très rythmé et calibré juste comme il faut : 90 minutes montre-en-main, pas le temps de trouver le temps long. Voilà une comédie qui ne se cherche pas inutilement, qui va à l’essentiel. A l’heure où les films de plus de 2h20 se multiplient, « Jusqu’ici tout va bien » ne fait pas de gras, ne se perd pas dans des intrigues secondaires inutiles, c’est déjà bien. On peut ajouter à cela que c’est très honnêtement filmé, habillé d’une musique très sympa qui va de Barry White à NTM, et que la Courneuve y est montrée avec une certaine tendresse, même si cela ne saute pas aux yeux d’emblée. Bien sur, pas de mouvements de caméra de « ouf », pas de plans géniaux ou de photographie léchée, ici, on est dans une réalisation académique propre et efficace. Le casting est assez pléthorique, avec pas mal de rôles secondaires bien croqués (même s’ils sont un peu plus caricaturaux que les rôles principaux). J’aurais peut-être aimé que certains soient plus écrits, comme celui tenu par Sabrina Ouazani, ou mieux écrits, comme celui incarné par Anne Elisabeth Blateau. Au final, ce sont les deux rôles principaux les plus crédibles. D’abord Malik Bentalha en maitre-chien qui a peur des chiens, parachuté directeur commercial au culot, il n’en fait pas des tonnes, même quand il se transi d’amour pour une jolie collègue blonde il est attendrissant sans être caricatural, pile poil dans le ton qui convient. Et puis Gilles Lellouche, en chef d’entreprise dynamique, qui se révèle en fil des minutes plus moderne et plus ouvert d’esprit que les 10 premières minutes (très caricaturales pour le coup) le laisse supposer. Après avoir beaucoup été sollicité en tant que second rôle et faire valoir de la vedette, Lellouche a quand même finit par se faire une place, « Le Grand Bain » n’y étant pas pour rien. Le scénario de « Jusqu’ici tout va bien » suis un schéma narratif ultra conventionnel pour une comédie sur un sujet comme celui-là.
Au début la cohabitation est difficile, puis les choses s’arrangent et les relations s’améliorent, puis une catastrophe arrive et il faut se mobiliser, se serrer les coudes pour la surmonter. Vous pouvez prendre toutes les comédies qui parlent d’une cohabitation entre des gens très différents, des cultures différentes, des âges différents, des caractères opposés, le schéma est presque toujours celui-là. Ca doit être une sorte de cahier des charges ou quelque chose dans le genre.
Bon, puisque pour l’originalité on repassera, est-ce qu’au moins c’est drôle ? Ben oui, sans être une comédie ou l’on s’esclaffe toutes les 30 secondes, l’humour de « Jusqu’ici tout va bien », un peu potache, un peu cliché, parfois absurde, un peu décalé aussi, me convient car c’est cet humour là qui me fait rire d’une manière générale, moi… Bien-sur, les clichés ne manquent pas sur les banlieues : l’insécurité, le racket, le trafic, le rap, les contrôles au facies, mais aussi l’autre face de la pièce : une vraie solidarité, convivialité toute sincère, une dynamique aussi, celle d’habitants qui ont du potentiel et qui le prouvent pour peu qu’on leur donne une chance. Les clichés ne manquent pas de l’autre côté non plus : les parisiens qui parlent de la banlieue sans y avoir mis les pieds, les chefs d’entreprises qui pestent contre les contrôleurs fiscaux, les gamins du XVIème qui n’en fichent pas une rame à l’école parce qu’ils sentent plus ou moins consciemment qu’ils s’en sortiront quand même. Et puis au milieu, il y a les fonctionnaires, forcément tatillons, un peu obtus. Ben oui, le film de Mohamed Hamidi c’est un peu la foire aux clichés, c’est sur. Mais c’est fait dans un esprit positif, avec des bons sentiments peut-être un peu naïfs mais au fond, dans un monde de cynisme absolu, ça ne fait pas de mal… J’imagine que les esprits chagrins se feront une joie de crier au film « Bisounours », laissons-les crier… Moi, j’ai passé un bon moment devant une comédie sans aucune prétention, et ca me va plutôt bien.