La lutte des classes, comédie sociale et politique est un film assez difficile à critiquer, voilà pourquoi il aura la note moyenne.
Quel est le message sous-jacent ? Désir de caricaturer les bobos de gauche ? De répandre de nouveaux clichés sur les habitants des banlieue, ou de poser un regard tendre sur ces quartiers ? De se moquer de l'école publique, ou bien de la défendre, de dénoncer son écroulement, d'encourager son achèvement ? S'agissait-il de la critique de la bien-pensance, ou bien d'une énième façon de nous l'imposer ?
Le propos du film manque terriblement de clarté, sans savoir d'où ça parle, il est assez difficile de savoir comment se positionner, ce que toute expression d'un avis oblige à faire.
Après le magnifique film "J'invente rien", le très bon "Le nom des gens", le moins bon "Télé-gaucho", La lutte des classes confirme que son réalisateur Michel Leclerc semble politiquement de plus en plus perdu. C'est peut-être cela que raconte le film ? Il reste à voir "La Vie très privée de Monsieur Sim" de 2015 pour, peut-être, éclaircir le propos du réalisateur.
Au delà de ce positionnement flou qui sème le trouble sur la façon dont il faut interpréter ce déferlement de clichés dont les comédies françaises nous abreuvent jusqu'à saturation. Le film est techniquement bon, agréable à regarder et Ramzy Bédia y apporte un bol d'air frais qui permet de tenir. Son personnage, simple, léger, sincère, à l'aise, sainement naïf et sans aucune posture vient contre-balancer celui interprété par Edouard Baer, qui devient assez vite lourd dans cette caricature malaisante d'ado attardé, démissionnaire, abstentionniste, rebelle par posture et totalement ringard.
J'aurais préféré voir le brillant François Bégaudeau dans le rôle de cet ancien punk. Peut-être aurait-il fallu faire appel à son grand talent de penseur et de scénariste-dialoguiste, pour construire un personnage principal plus solide.
C'est peut-être là que se situe le défaut du film, Edouard Baer aurait été bon pour interpréter un vrai bobo parisien, qui ne met pas les pieds à Bagnolet et qui ne se revendique plus de gauche depuis longtemps, mais ici, il est utilisé à contre-emploi, et le personnage n'est pas solidement construit, il est difficile à identifier, à détourer, trop atypique, un profil trop rare pour créer un archétype lisible qui fonctionne dans un film. Ce personnage illisible, rend le reste du film trés flou.
Ce personnage perdu nous perd avec lui. Pourtant tous les autres rôles, sont bien incarnés, bien ancrés, résistent aux clichés qui en sont fait, peut-être ne manquait-il qu'un peu plus de travail sur le personnage de Paul Clément pour positionner le film et en rendre le propos plus lisible.
Michel Leclerc traite régulièrement le thème des contradictions de la gauche française dans ses film, il traite ici, à partir d'un expérience personnelle, de ces propres contradictions, mais ce thème est-il la préoccupation du grand public ? Les présupposés biographiques du réalisateur sont-ils connus ? De toute évidence, non, trop de clés manquent à la bonne compréhension du film qui ne concerne au fond qu'un microcosme concerné par la question. Cela explique certainement les nombreuses 3 étoiles données au film et les critiques mitigées.
Si certain auront compris que la lutte des classes dont parle le film est une lutte intérieure, intime et très personnelle, beaucoup de spectateurs n'auront légitimement pas compris le sens de cette introspection quelque peu nombriliste.
La solitude, le décalage et l'isolement de Paul Clément illustre assez bien, ce rejet de préoccupations, certes écoutables comme toute forme de souffrance intime, mais qui ne sont pas celles de la majorité des Français qui voient ce film.