Ce film n'est pas mauvais car il présente l'intérêt de dénoncer les effets collatéraux de la gentrification de la périphérie Est de San Francisco, où les classes moyennes ont été chassées par les csp (on pourrait d'ailleurs faire bien d'autres films en lien avec le sujet dans d'autres agglomérations). Cependant, l'accent mis sur la violence (celle des protagonistes, en particulier de l'acolyte de Collin, de l'ambiance) et un certain manichéisme rendent le film assez grossier. La bande-annonce promet quelque chose de plus tendu, de plus fou, or il n'en est rien. Il oppose bobos et classe populaire en prenant les extrêmes (hipsters stupides, mecs violents à tendance sociopathe) et, en outre, ne se départit pas d'une vision sexiste ou binaire, avec des femmes pacifiques qui font presque figure de saintes (..nitouche?) et des hommes marqués par la rage, l'avidité et l'inconséquence. Ensuite, on ne peut pas dire que l'histoire soit formidable, beaucoup de critiques ont exagéré (d'où la récolte d'avis négatifs: on ne peut pas plaire à tout le monde). On pourra par ailleurs relever quelques faux-raccords. En raison de ces aspects, on a ressenti le film ni attachant, ni indispensable. En revanche, qui plus est pour le premier film (C. Lopez Estrada), on peut reconnaître sans mal un excellent niveau de réalisation, soutenu par un bon jeu d'ensemble. Collin est incarné avec brio (comme celui de son acolyte, Miles, complètement tordu) par Daveed Diggs, lui-même né à Oakland; l'illusion est parfaite. Le scénario n'évite pas certaines coïncidences attendues. Si le suspense reste palpable tout au long de l'histoire, c'est plus dans un sens psychologique qu'en matière d'action. L'histoire à rallonge (les interminables derniers jours de correctionnelle), le mauvais rap, des attitudes qui relèvent de l'homophobie... tout ça finit par taper sur les nerfs. Tout en évitant tout de même la facilité, le film insiste trop sur l'idée de rédemption de ces deux potes. Quant au blindspotting, cet angle mort soi-disant invisible au cerveau, il tisse un fond réflexif peu pertinent. Le jeu sur les couleurs rouge (danger, violence, peur) et verte (liberté, sagesse, santé - placement produit en passant) est par contre plutôt bien senti.