Je ne connaissais pas Quentin Dupieux, présenté selon les critiques comme un cinéaste conceptuel, un artiste à double le visage, chanteur, cinéaste autodidacte, bricoleur fantaisiste, adepte du non-sens, héritier d’un lointain dadaïsme , plus ou moins un artisan qui fabrique ses films de A à Z…Bref, de quoi nourrir une certaine appréhension avant d’entrer dans la salle…eh bien Le Daim fut pour moi une agréable surprise, très drôle, certes un peu gore sur la fin mais beaucoup moins que la récente Palme d’or Parasite…un scenario complètement farfelu, quasiment déjanté, mais un film abouti porté par un duo d’acteurs épatants, entrainés dans une partie de poker menteur diabolique.. Jean Dujardin est Georges, il s’est séparé de sa femme, ou bien l’inverse et fuit au volant de sa vieille Audi…dans les toilettes d’une station service, il est confronté à son image et brutalement se débarrasse de sa veste bronze en velours côtelé... Quelque temps après on le retrouve dans un endroit perdu chez un vieil homme, monsieur B. interprété par Albert Delpy, auprès duquel il se procure à prix d’or ( j’ai cru que c’étaient des francs, compte tenu des couleurs très années 70 du film) un blouson de daim à franges, très vintage mais aussi très ringard, un peu juste pour sa taille…en bonus le vieux lui offre un vieux caméscope…Pour Georges c’est une révélation, son blouson lui donne un style de malade et il sera complété au fur et à mesure du film, par un chapeau, des bottes, un pantalon, des gants, tout en daim cent pour cent véritable…malade il le devient aussi, sombrant dans une quasi folie où il entretient un dialogue avec son blouson . Désormais converti à son blouson frangé, Georges non seulement décide qu’il n’en sera plus jamais séparé, mais tend à penser que le seul vrai blouson est le blouson qu’il porte et que partant les autres blousons ne sont que de vils imposteurs qu’il faut combattre sinon abattre …Entre temps il aura subtilisé un manuel sur les métiers du cinéma, lu la notice d’utilisation de son caméscope et se fait passer pour un cinéaste notamment auprès de Denise, interprétée par Adèle Haenel, la jeune serveuse de l’hôtel désert où il s’est réfugié , qui elle, est réellement une étudiante en montage …est-elle naïvement persuadée qu’elle est en train de monter un film, est-elle complice d’un fou dont elle imagine le film qui pourrait être tiré de cette folie…Le doute est permis …C’est une comédie hilarante, Jean Dujardin est irrésistible, paranoïaque, mégalomane, mythomane, narcissique….Le Daim est filmé dans des tons très années 70, un beige tirant sur le marron ou le jaune « pipi » , les images sont parfois un peu floues, les paysages vides…ceux qui connaissent Quentin Dupieux peuvent y voir, au travers du rôle de Georges, une interrogation sur sa propre expérience de cinéaste souvent chaotique…J’en suis resté au premier niveau , j’ai accepté que l’absurde devienne normalité et j’ai aimé..…