Je tremble ô Matador est à l’origine un roman écrit en 2001 par l’écrivain et artiste LGBT chilien Pedro Lemebel (1952-2015). Le metteur en scène Rodrigo Sepúlveda explique : "Cette œuvre incroyable est d’ailleurs l’unique roman qu’il a écrit de sa vie. Cette histoire d’amour entre un vieux travesti et un guérillero qui prépare un attentat contre la dictature dans le Chili des 80 a été très populaire dans notre pays. C’est cette œuvre qui a servi directement de point de départ au scénario qui j’ai écrit."
Trouver l'équilibre entre l’aspect sentimental et l’aspect politique du récit a été compliqué : "Il s’agit d’une histoire d’amour particulière en raison du contexte politique. Les deux personnages principaux, Carlos et La Loca, vivent chacun dans le secret : Carlos pour être un guérillero, et La Loca pour être homosexuel dans un pays où l’homosexualité était illégale."
"Mon intention était donc de donner à ressentir qu’ils vivent chacun dans un monde soumis à l’isolement : qu’il s’agisse de l’espace intérieur de la Loca ou de l’espace social public d’un pays vivant sous une dictature", confie Rodrigo Sepúlveda.
Les cinéastes ayant plus ou moins inspiré Rodrigo Sepúlveda pour la conception de Je tremble ô Matador sont Ingmar Bergman, Théo Angelopoulos, Orson Welles, Wong Kar Wai, Lars von Trier, Alan Clarke, Mike Leigh ou encore Michael Haneke.
L'acteur Alfredo Castro a longtemps travaillé au théâtre et à la télévision dans les années 1980. Il précise : "Je connais toutes les techniques et je comprends que l’on ait besoin de s’accrocher à une méthode quand on est jeune. Mais j’en suis arrivé à la conclusion, par la pratique, qu’il ne faut pas « jouer »."
"Par ailleurs, je ne crois pas réellement aux personnages. Je ne crois pas qu’ils existent. Je conçois qu’il y ait une fiction écrite, mais une fois que cette histoire m’est donnée par le réalisateur ou par la réalisatrice, elle cesse d’être une fiction pour devenir une part de ma nature."
"Par conséquent, mon exploration consiste à métaboliser cette fiction, cette biographie, ce corps, cette expérience et, au son du mot « action ! », à la vivre et à la sentir, et pas à la « jouer »."
Le titre original du film (Tengo miedo torero) provient d’une chanson sentimentale. Le réalisateur confie : "Je pense que Tengo miedo torero est une chanson qui met en lumière le drame intérieur de La Loca. La Loca sait que chaque fois que Carlos n’est pas avec elle, il est en danger, de la même manière qu’ un torero met sa vie en danger à chaque fois qu’il va se produire dans l’arène."