Pourtant, ce n'est pas la première fois qu'on nous fait le coup. Les Bronzès 3 venant écorner 27 ans plus tard le souvenir ému de deux premiers volets emblématiques des années 1970, Les trois frères le retour caricaturant son immaculé prédécesseur et l'héritage même des Inconnus dans la culture populaire, Les Visiteurs, Les Randonneurs, Trois hommes et un couffin, la liste est longue d’œuvres influentes trahies par des séquelles au ras des pâquerettes. Et, coïncidence ou pas, produite longtemps après l'original. Mais voilà, Tanguy (2001), comédie savoureuse devenue un terme courant pour évoquer un enfant vivant toujours au foyer parental à un âge avancé, semblait pouvoir éviter les écueils de ce syndrome de la mauvaise suite tardive. Le potentiel était là, les trois acteurs principaux et le réalisateur ayant rempilés, on voulait y croire en faisant fi de la raison. Une bande-annonce astucieusement montée se chargeait d'augmenter un peu plus les espoirs. Il ne faut pas plus de vingt minutes de film pour se rendre compte de la tromperie, nous voici face à un objet fade, sans peps, sans ressort, comptant seulement sur la sympathie de ses interprètes pour faire avaler de grosses inepties. Le manque de rythme initial plombe toute velléité comique, autant que des idées s'écartant trop largement de l'esprit du premier volet (en quoi les problèmes de prostate de Paul et d'arthrose d'Edith sont censés être drôles ?). On espère un décollage lorsque les parents affûtent leur plan d'action, mais on décroche seulement des sourires devant les gags recyclés. Quant aux nouveaux… tout simplement lamentables ! À commencer par tous les rôles secondaires envahissants : La fille philosophe décomplexée apparaît antipathique, la mère immature pollue l'intrigue, le meilleur ami de Tanguy passe une tête sans la moindre raison (malgré un rôle d'avocat primordial dans le premier opus), une amie de golf reprend en mode mineur la partition sceptique de la grand-mère dans l'original, aucun ne semble croire au projet. Le plus grave restant l'inversion involontaire de l'empathie : dans le premier, on se prenait à soutenir les parents face au flegme de Tanguy, ici ils s'avèrent cruels sans grand motif devant un rejeton ne se situant plus dans l'optique de s'incruster à tout prix. Puis, que dire de l'univers dans lequel se situe l'intrigue ? Il semble désuet, bloqué dans un monde n'existant plus, et ce ne sont pas quelques références à Netflix qui sauvent les meubles.
Au-delà de ce ratage complet, c'est un avis de décès définitif pour le cinéma d'Etienne Chatiliez, autrefois doté d'une patte propre, désormais largué. Cet écart de 18 ans entre les deux Tanguy coïncide également avec la dernière fois où l'on a ri franchement à un film de ce réalisateur.
De retour ces jours-ci, la bande à Guillaume Canet sauvera-t-elle la mise du genre avec Nous finirons ensemble, suite une décennie plus tard d'un des gros succès public de l'acteur-réalisateur, Les petits mouchoirs ?