Car j'arrive jour après jour à combler mes plus grosses lacunes cinématographiques : j'ai enfin vu Orange Mécanique ! Ce qui est délicat lorsqu'on regarde si tard un monument du cinéma c'est qu'il faut réussir à se détacher de tous les avis et remarques qu'on a pu entendre dessus afin de se construire une opinion personelle. Car oui, j'ai entendu nombre d'opinions divergentes à propos du film de Kubrick, et en le voyant je comprend évidemment pourquoi. Dire que le film dérange tiendrait de l'euphémisme tant Orange Mécanique bouscule le spectateur. En effet, on regarde et on cherche un message au milieu de ce bouquet d'images ultraviolentes qu'on nous inflige. On cherche ce message qui permettrait de légitimer la création d'une oeuvre aussi malsaine mais qui pourtant fascine. On ne peut pas le nier : il est impossible de décrocher de ce film tant la réalisation est irréprochable. Je n'idolatre pas Kubrick pour tous ses choix mais je dois dire que je suis tout simplement bluffé par sa mise en scène, qui, pour la troisième fois me laisse sans voix. La longueur des plans, le cadrage, le placement des acteurs, les mouvements de caméra : tout est pertinent et réussi à surprendre constamment. Rien est à changer au niveau technique dans ce film, Kubrick arrive même à intégrer un ralenti et un accéléré de façon magistral. Si cela parait peut être secondaire, c'est en tous cas notable car on ne peut pas toujours parler de pertinence lorsque ces effets sont employés dans certains films actuels. Donc au niveau réalisation, qu'une chose à dire : c'est une leçon de cinéma ! Comme dans tous les films de Kubrick, la musique a ici une importance capitale et sert à accompagner l'évolution du personnage principale allant même parfois jusqu'à se substituer à certains dialogues qui auraient été moins pertinent. Et le choix de la musique... parfait, que dire de plus.. Pour l'adepte de musique classique que je suis, passer plus de 2heures sur fond de Beethoven c'est un véritable régale. Voilà une bande originale que je réécouterais en boucle ! Revenons plus directement au film, à son scénario et ce fameux message qui rendrait acceptable la multiplicité des scènes violentes (physiquement et moralement). Si certains s'efforcent de trouver un message ultra philosophique recoupant les pensées de tel ou tel philosophe, je n'irais quant à moi pas si loin. Je pense qu'il ya sans aucun doute un message derrière tout ça et en aucun cas très difficile à appréhender. Le film veut faire réfléchir sur les statuts de bourreau et de victime qui peuvent s'inverser, s'entremêler allant même jusqu'à se confondre. Et au final, qui est le coupable de la violence, le pauvre Alex ou la société entière ? Voilà à peu près comment je décrypterais le message d'Orange Mécanique, qui fait réellement réfléchir. En sortant du visionnage, on se rend compte à quel point Orange Mécanique est un de ces films que l'on peut qualifier de film "coup de poing", un film qui ne laisse pas indemne et qui pousse à plus de réflexion. Mais n'oublions pas que nous sommes face à une oeuvre cinématographique et que le scénario, si bon soit il ne pourrait compenser une réalisation qui serait bancale. Et nous l'avons vu précédemment : celle de Kubrick est absolument irréprochable. Je m'arrête juste un instant sur la prestation qde Malcolm McDowell qui est inégalable. Il donne vit ici à un personnage culte du cinéma rejoignant les Charles Foster Kane ou autres Don Corleone. Son jeu est mémorable et il parait difficile après visionnage de savoir qui d'autre aurait pu délivrer une prestation semblable. Il me semble bon d’achever ma critique sur ce dernier point pour les quelques courageux qui m’auront lu jusqu’au bout ! Pour conclure j’hésite à employer le terme « chef-d’oeuvre » de peur que ça devienne une habitude pour désigner les films de Kubrick. ;) Mais si je n‘emploie pas le mot, vous aurez compris que ce film en est malgré tout un malgré tous mes efforts pour lui trouver des défauts, et il rejoint en conséquence les rangs fermés de mes films fétiches. Un très grand film, à voir absolument pour sa singularité … et à revoir au plus vite !