Le romantisme pur au cinéma ? Quai des brumes.
Après la vision de cet incontournable classique, on saisit mieux encore, toute la saveur de cette phrase de Gabin disant qu« Au cinéma, tout est une question de loupes ». Au milieu de ce « Quai des brumes » en effet, deux éclaircies surgissent dans les regards de Jean Gabin, 34 ans, et de Michèle Morgan, 17 ans. Le réalisateur Marcel Carné proposant lui, assurément lun des cinq films majeurs français davant-guerre. La mise en scène, le montage et limage ont certes mal vieillis normal, en 67 ans
-, mais de grâce, oublions une fois pour toutes, ces facteurs techniques, finalement secondaires. Et écoutons plutôt les dialogues poétiques de Jacques Prévert, dun temps désormais révolu. Ressentons des émotions qui touchent à leur paroxysme, par cet amour impossible entre ce déserteur de larmée et cette orpheline si naïve. Admirons tous ces merveilleux personnages, dont Michel Simon et probablement le plus talentueux des Brasseur, Pierre. La prestation aussi, de Robert Le Vigan, ce peintre mélancolique, et du désoeuvré Aimos, décédé durant la guerre. Et en toile de fond, la ville bretonne du Havre, son port notamment
« Quai des brumes », à notre époque, ce nest plus du cinéma. Cest du roman. Du roman filmé. Des émotions canalisatrices. Des battements de cur. De lémerveillement face à cette insouciance totale, que la guerre viendra définitivement briser. Face également, à léternelle jeunesse de nos deux monstres sacrés. Des larmes peut-être, lorsque lon entend la réplique la plus célèbre du cinéma français
« Tas de beaux yeux tu sais
dit Jean
Embrassez-moi
répond Nelly »
Difficile vraiment, encore aujourdhui, de ne pas sortir heurté par le visionnement de ce chef duvre immortel, répétons-le