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Yves G.
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2,0
Publiée le 23 juin 2019
Paula est étudiante en arts. Sa vie à Medellín, dans la moyenne bourgeoisie intellectuelle colombienne, est sans nuage jusqu’au drame qui la frappe : son père, professeur d’université, est assassiné sous ses yeux par deux tueurs à gages en moto. L’enquête s’enlise. La police, débordée et corrompue, ne fait rien. Paula, qui s’est jurée de venger son père, croise par hasard l’un des sicaires qu’elle a eu le temps de reconnaître. Jesús est un jeune voyou des mauvais quartiers, un chien fou aussi inquiétant qu’attachant.
« Qu’il est joli garçon, l’assassin de Papa ». En un vers plein d’ironie, Georges Fourest résumait l’intrigue du Cid. Il aurait pu résumer celui de ce drame colombien largement autobiographique, la réalisatrice Laura Mora ayant vu mourir sous ses yeux son père assassiné dans les rues de Medellín en 2001.
Le pitch de "Matar a Jesús" est stimulant. Hélas, le film ne fonctionne pas ; car on ne croit pas une seconde au « couple » improbable que forment Paula et Jesús. Comment la jeune femme peut-elle être à la fois écrasée de douleur après la mort de son père et attirée par son assassin ? Comment peut-elle dans le même mouvement fomenter une sanguinaire vengeance – dont on sait pertinemment qu’elle n’aura pas le cran de la mettre en œuvre – et sillonner les rues de Medellín blottie derrière lui sur sa moto ?
On me répondra que c’est précisément cette ambiguïté, cette schizophrénie qui font tout l’intérêt du personnage de Paula. Certes. Sauf que ça ne fonctionne pas.
Reste la description naturaliste de la deuxième ville la plus peuplée de Colombie, de ses quartiers pauvres où la violence sociale nourrit la violence physique, loin des fresques lyriques consacrées à la vie de Pablo Escobar.
Il y a forcément une certaine gêne devant un film aussi cathartique que Matar a Jesus, qui s'inspire du drame qu'a vécu sa réalisatrice, Laura Mora, témoin de l'assassinat de son père, il y a 10 ans à Medellin. La deuxième ville colombienne, symbole de violence et d'inégalités sociales, est l'interprète principal d'un film qui a pris le parti de n'engager que des acteurs non-professionnels. Pour l'authenticité et pour l'argot local qui ne pourrait sembler naturel dans la bouche de comédiens étrangers à la cité. Ces détails, évidemment, échappent à notre jugement et si le caractère réaliste du long-métrage est indéniable, il est beaucoup moins convaincant d'un pur point de vue cinématographique. Le scénario hésite un temps entre récit de vengeance pur et description du cycle de la violence avant finalement de se focaliser sur les relations entre deux jeunes gens aux antipodes sociales, le garçon étant le meurtrier du père de la fille. C'est là que l'interprétation pêche un peu, quand les rapports entre les deux personnages principaux deviennent troubles et focalisent l'attention du récit de manière excessive. La mise en scène de Laura Mora, de son côté, abuse des plans à l'épaule et fait parfois preuve de maladresse dans ses efforts pour rendre compte de la tension permanente qui habite certains quartiers de Medellin.
Avec « Matar a Jesús », Laura Mora réalise un film autobiographique sous tension. En 2002, son père s’est fait assassiner sous ses yeux et son impuissance par des tueurs à gages en Colombie. Ce film s’en inspire et la jeune non-professionnelle Natasha Jaramillo a la lourde tâche d’interpréter ce rôle qui mêle la tristesse, l’impulsivité, la colère, la résignation et l’acceptation. Nous sommes à ses côtés tout du long de cette histoire brillamment menée. En effet, alors que l’enquête officielle semble déjà classée, Paula va faire la connaissance de l’assassin de son père. Il s’appelle Jesús et elle est bien décidée à se venger. C’était sans compter l’étrange relation qui va se nouer entre eux… A la fois authentique et touchant, « Matar a Jesús » décrit la violence psychique d’une femme qui voulait obtenir justice et la complexité d’un passage à l’acte. D'autres critiques sur notre page Facebook : Cinéphiles 44 et notre site cinephiles44.com