Gueule d'Ange de Vanessa Filho m'a noué la gorge. Et pas seulement pour son sujet déjà raconté dans les post précédents, mais aussi pour sa facture, et la qualité de sa réalisation. Pour son premier film, la réalisatrice investit le cinéma, et prouve que l'on peut parler de la vie ordinaire des gens, même si elle est dure, sans renoncer à une direction artistique solide. Combien de films français en raison de sujets tirés de la vie réelle limitent la réalisation à un souci de vérité crue, nue. Comme si une caméra "objective" prenant des airs de documentaires pouvait seule parler de la vraie vie des gens. Vanessa Filho prouve que l'on peut faire autrement (elle n'est pas la seule évidemment). Mais j'ai aimé être dans la salle, prendre ce film comme un coup de poing, tout en me disant : heureusement que je n'ai pas découvert ce film sur ma télévision. Une scène de boîte de nuit, où Marlène emmène sa fille, est pour moi, un pur moment de cinéma. Du mixage, au découpage des plans, le rythme du montage, le jeu des comédiens... tout s'imbrique dans une séquence en apesanteur. Scène dont le dénouement sera l'un des climax émotionnel et tournant du film où Marion Cotillard atteint un degré de justesse saisissant. Il faut vivre ce moment au cinéma pour plonger dans cette boîte de nuit vue à travers les yeux d'une petite fille qui ne peut comprendre cet étrange paradoxe de la vie : on peut être aimé et pourtant être seul. D'autres séquences de "Gueule d'Ange" sont de cette qualité, et nous rappellent en tant que spectateur que le cinéma, finalement, ça devrait toujours être ça...
Quel que soit le sujet ou le genre, on devrait pouvoir se dire : ce film a été fait pour être vu dans cette salle, avec ce son, ces couleurs, cet écran immense. Ici, je peux vivre une expérience émotionnelle, visuelle et sonore. Ce n'est pas sur mon Iphone, mon pc, ou ma télévision mais là, parmi ces gens, parce que c'est du cinéma, du vrai. Gueule d'Ange est de ces films là...