Joker est un chef d’œuvre, autant dans l’intrigue qu’artistiquement parlant. À la fois par sa fabuleuse bande-son, en passant bien évidement par son esthétisme grandiose, puis jusqu’à l’impressionnante performance de Joaquin Phœnix. Ces trois éléments se mêlent avec une puissante harmonie pour aboutir à une réalisation incroyablement poignante. Ce film nous traduit très justement la détresse et la souffrance d’un personnage détruit par la vie et par les autres, que ce soit à travers tous ces plans fixes centrés sur ce visage expressivement triste, ou toutes les scènes intensément longues et lentes accompagnées par cette magnifique musique assourdissante composée par la talentueuse violoncelliste Hildur Ingveldardóttir Guônadóttir. En plus de cette soundtrack spectaculaire, aussi pesante qu’angoissante, se rajoute des classiques de la musique en concordance parfaite avec le film tels que « Smile » de Jimmy Durante, « That’s Life » et « Send in the clowns » de Frank Sinatra. Les images époustouflantes, froides et sombres, retranscrivent avec brio le quotidien minable et destructeur d’Arthur, ce pauvre garçon mentalement malade dont l’unique ambition est de faire rire les autres. Cet univers de clown créant un contraste avec sa douleur et son mal-être. Un garçon qui finira par être façonné par ce monde horrible et sans scrupule dans lequel nous vivons, un monde qui n’a pas su accepter sa différence et en a fait sa souffrance. Son rire rempli de tristesse et de désespoir en témoigne, à ne plus distinguer le rire du pleur. Un ricanement dégageant l’inverse de la joie pour ainsi dire frôler la terreur, en effet entre peur et compassion, Arthur nous inspire des sentiments paradoxaux. Joaquin Phoenix est extraordinaire, nuls mots ne sauraient décrire cette incroyable et frissonnante performance. Tout dans sa façon d’être est singulier, que ce soit son regard, sa démarche, ses postures, sa maigreur, puis son rire bien sûr. Il donne froid dans le dos tout en restant attachant. On apprend beaucoup de choses sur le Joker, un personnage profond qui en dévoile énormément sur notre société : les riches contre les pauvres, le rejet de la différence ou même la fatalité de notre destin défini par la classe sociale. On finit par le voir avec un œil totalement différent, à presque le considérer comme étant le « gentil », ou en tout cas juste un vilain petit canard rejeté et mal aimé, élevé dans la misère et l’agressivité, qui finit par dérailler. Toute cette violence et cette colère qui se libèrent en même temps créent le fameux Joker comme on le connaît. On assiste à une impressionnante transformation appuyée par le jeu d’acteur de Joaquin Phœnix, un jeu d’acteur d’autant plus ahurissant à la fin. Alors que la folie le submerge, le gentil gars timide et triste devient cet homme cruel. Mais je ne peux m’empêcher de trouver certains de ses mots justes : le système qui décide de ce qui est bien ou mal, de ce qui est drôle ou pas, et qui ne laisse aucune place à la différence. La fin est d’une grande puissance, toujours accompagnée par cette musique assommante qui appuie la violence et l’affrosité du dénouement final, c’est à dire l’adoration de ce meurtrier suivit du chaos « Ain’t that beautiful ». Les dernières images illuminant le visage de Joker suggèrent qu’il a finit par trouver sa lumière, sa voie, et c’est le début du commencement. Un grand bravo à Todd Phillips qui a créé un film déjà culte.