Vu au ciné "LES EBLOUIS", première réalisation de l'actrice Sarah Suco, une histoire inspirée de sa propre vie, de sa propre enfance, à travers le récit de cette famille embrigadée dans une communauté religieuse apparentée à une secte. Dès le debut du film on pénètre dans cette communauté (un peu trop vite d'ailleurs, il manque un peu d'explications) dirigée par une sorte de prêtre qui se fait appeler "le berger" (les membres bêlent à son arrivée!). Tout l'embrigadement va s'opérer, se développer à travers les yeux de la grande fille de la famille, une ado de 14 ans qui est à un âge difficile, un age où tout change, où l'on s'interroge, où l'on se rebelle aussi, et la jeune femme en devenir va voir toute sa famille s'enfermer avec elle et se renfermer, s'isoler( jusqu'à ne plus voir les grands parents suite à une manipulation mentale), jusqu'à ne plus pouvoir assumer sa vraie vie de jeune fille, elle va douter, revenir, se rebeller encore avec sa rage et sa douleur, sans pouvoir vraiment choisir, coincée entre sa volonté d'être libre et son désir de ne pas faire de mal ni de tort à ses parents, jusqu'à un terrible événement qui la fera basculer humainement et psychologiquement, ayant compris alors que tout est allé trop loin et qu'il en est alors de la vie de ses frères et soeurs et de sa propre survie. Si la mise en scène est très classique et sans surprise, si certaines imperfections sont là, l'ensemble est suffisamment fort et puissamment construit pour nous emporter et nous prendre aux tripes, il y a à la fois beaucoup de douceur et de douleur dans cette histoire intime, jamais caricaturale qui fait froid dans le dos et révolte, qui renvoie à de récents faits divers ou la famille explose, où une pseudo-religion peut aveugler, éblouir des familles fragilisées et qui sont alors sous emprise totale. Les interprètes sont tous très justes: le grand Jean-Pierre Darroussin (pour une fois en personnage pas sympathique) est une nouvelle fois extra, dans un rôle secondaire mais très important, primordial, en gourou pervers à l'ambiguïté à la fois inquiétante et fascinante, dans les rôles des parents Éric Caravaca -en père pleutre et dépassé -et Camille Cottin- formidable et méconnaissable en mère sous emprise- sont vraiment bien, comme le sont aussi les plus jeunes enfants, mais c'est surtout Céleste Brunnquell qui porte le film entier sur ses jeunes épaules, elle nous touche, nous bouleverse, comme dans sa scène de confession à la police, où elle veut dire l'indicible (la jeune actrice est justement prenominee comme meilleur espoir feminin), un premier film réussi pour un sujet dur et fort, étouffant et glaçant!