Après deux DTV intitulés "Escape Room" de piètre réputation en 2017, il semblait étonnant qu'aucun producteur ne surfe sur le succès des fameuses salles à énigmes pour les utiliser dans une version forcément plus meurtrière sur grand écran. Après tout, on pouvait légitimement supposer que le public de plus en plus friand d'escape rooms répondrait présent et le succès de la saga "Saw" reposant sur un concept similaire a prouvé que la demande de voir des personnes coincées dans une salle avec un mystère à résoudre pour éviter les pires tortures était bel et bien présente. C'est désormais chose faite avec ce "Escape Game" réalisé par un Adam Robitel révélé par le chouette found-footage "L'Etrange Cas de Deborah Logan" puis rapidement oublié à cause d'un insipide "Insidious 4". Bonne nouvelle, c'est plutôt le réalisateur du premier que l'on retrouve derrière la caméra d'un divertissement efficace mais tout de même trop maladroit pour marquer durablement les esprits.
Six personnes reçoivent toutes un mystérieux casse-tête de la part d'un de leurs proches les invitant à participer à un escape game de la société Minas avec à la clé une récompense de 10 000 dollars...
Après une scène d'ouverture en forme de flashforward aussi stupide qu'inutile (pourquoi se tirer une balle dans le pied d'office en grillant un événement qui n'arrivera que bien plus tard ?...) et une rapide présentation de trois de ses protagonistes, "Escape Game" prend la bonne initiative de pas plus perdre de temps en rentrant directement dans le vif de son sujet. À peine réuni dans la salle d'attente de la mystérieuse société Minas que, hop, notre petit groupe de six étrangers se retrouve déjà confronté à leur première énigme sous peine d'une mort imminente. En ce sens, le rythme ne faiblira d'ailleurs jamais car, conscient que le spectateur s'est déplacé un peu uniquement sur le simple postulat de ces d'escape rooms sanguinaires, Adam Robitel va quasiment tout miser sur la découverte et les énigmes de chacune des pièces plus tordues les unes que les autres. Et ça marche ! Chaque environnement proposé réserve toujours de bonnes surprises (mentions spéciales au bar et à une autre d'inspiration psychédélique qui proposent toutes deux de belles envolées visuelles) et se révèlent particulièrement vicieuses en torturant mentalement chaque protagoniste avec un traumatisme venu de leurs passés respectifs. Comme eux, on se prend rapidement au jeu de comprendre la résolution des différentes énigmes et, au risque de rendre fades toutes les escape rooms du monde entier vis-à-vis de leurs futurs clients, celles du film sont d'une efficacité redoutable dans leur objectif d'amener les participants à comprendre les raisons de leur réunion dans ces épreuves. Bref, vous étiez venus pour voir des escape rooms fatales envers ses joueurs, "Escape Game" vous en fait visiter une galerie habilement pensée pendant toute sa durée. Alors que demandez plus ?
Eh bien des participants à la hauteur justement ! Sur ce plan, "Escape Game" ne propose hélas qu'une fournée de personnages aussi rudimentaires que ceux d'un film de la saga "Saw". Même si le cheminement de leurs réflexions pour s'en sortir n'en font pas les plus bêtes que l'on ait vu, leurs personnalités en majorité à facette unique ne facilitent pas des interactions de groupe vraiment originales. En fait, ils sont la plupart du temps seulement définis par leurs actes (passés et présents) et peinent à exister en dehors si ce n'est quand certains de leurs interprètes parviennent à leur donner un minimum de profondeur (bravo en particulier à Deborah Ann Wolf, Jay Ellis et la jeune Taylor Russell).
Évidemment, "Escape Game" tente de mettre en relief le mystère des raisons qui ont amené à leur réunion face à leurs tortionnaires représentés par l'objectif d'une caméra pour nous rejouer une ambiance à la "Saw" ou "Cube", promesse d'une énigme globale bien plus importante que celles résolues de pièce en pièce. Seulement, le manque d'habileté et le côté aléatoire avec lesquels nous sont balancés plusieurs flashbacks sur chacun des personnages ne laisse que peu de place aux doutes sur la finalité de leur présence.
Lorsque celle-ci est révélée dans la dernière partie, "Escape Game" se mue en un enchaînement de révélations à 100km/h pour tenter de construire une mythologie censée ouvrir les portes à une franchise mais, en réalité, la précipitation ressentie autour de son élaboration ne parvient jamais à masquer sa vacuité ou le fait que ses fondations aient été utilisées maintes fois ailleurs et en mieux.
On ressort de "Escape Game" avec le sentiment de promesses tenues, le job autour d'un escape game dévorant littéralement ses candidats a été fait mais c'est hélas tout. Avec des personnages bien plus fouillés et une volonté d'offrir une véritable conclusion au lieu de se concentrer sur la manière d'ouvrir les vannes à une suite, Adam Robitel aurait pu miser sur un bien meilleur résultat tant le déroulement des épreuves mises en scène paye par son efficacité.