Passons à côté de la polémique que l’affiche du film sortie par Netflix a engendré, polémique alimentée par une poignée de personnes peu intelligentes qui n’a pas cherché à comprendre le message évident du film. Mais passons, ne nous énervons pas tout de suite, gardons-en pour le fond illustré par Mignonnes.
Aminata, Ami, 11 ans, débarque dans un nouvel appart, un nouveau collège et y fait immédiatement la rencontre de LA bande de filles populaires du bahut. Cette bande que vous avez tous détestée lorsque vous aviez 12 ans (pardon si vous en faisiez parti…). Et l’entrée en scène de cette bande de gamines annonce déjà la couleur : le monde d’aujourd’hui pourrit notre jeunesse et efface l’insouciance de nos enfants. Si la mère d’Ami nous est montrée plutôt pieuse et proche de ses coutumes (coutumes qu’elle se force d’ailleurs à accepter à contre cœur par moment), ce n’est pas par dégoût de cet environnement que sa fille s’attache à la petite bande de poupées, mais par une envie de se faire des amies, d’exister, voir même de s’amuser. Elle tente à fuir la solitude et sa situation familiale difficile. Une fois ce constat posé, nous pouvons nous concentrer sur le problème que soulève le film : l’hypersexualisation des jeunes filles. Je me demande bien quand notre société est partie en sucette à ce point ? Née en 1994, en 6ème je portais encore des barrettes multicolores, des t-shirts avec des chiots dessus et des pantalons colorés, je vivais ma meilleure vie ! Une fois arrivée au lycée, lorsque je repassais devant mon collège, je voyais déjà les gamines de 12 ans porter des leggings moulants, se maquiller à outrance et faire attention à leur ligne. C’est sûrement l’apparition du smartphone qui a tout gâché… Comme le film nous le montre, l’accès à du contenu pornographique est possible à tout moment, et même sans parler de pornographie avérée, il suffit de chercher un clip sur Youtube, il y en a des dizaines de milliers qui montrent des femmes hypersexualisées. Une femme hypersexualisée, d’aucun dirons qu’il n’y a aucun problème à ça (le débat est complexe) si elles sont majeurs et vaccinées, mais le problème arrive lorsque ce sont des enfants d’une dizaine d’années qui entrent dans cette hypersexualisation pour faire « comme les grandes ». A quel moment notre société a décidé de laisser des enfants s’identifier à cette image de la femme objet que la société machiste a inventé ?
Ami et ses amies se mettent à se déhancher d’une façon sexuellement explicite en rêvant de gloire et de grandeur pour remporter un concours de danse et le malaise naît en nous. Leur chorégraphie nous rappelle celle de Little Miss Sunshine et amène avec elle une rage qui vous donne envie de vomir et de pleurer. On souhaite secouer ses gamines pour leur dire de profiter de leur enfance plutôt que de chercher à plaire aux hommes dès maintenant. Être une femme de 20 ans est déjà assez compliquée comme ça, ne gâchez pas vos années d’insouciances ! La tension et la dénonciation de cette société qui pourrie les jeunes filles arrive à son comble quand Ami tente le tout pour le tout dans l’unique but de récupérer son téléphone portable. On y pense, on n’y croit pas, mais l’idée lui traverse l’esprit. Et la scène finit mal, très mal, pas comme on l’aurait pensé, mais en pire sûrement. Les réseaux sociaux enfoncent les protagonistes dans l’idée qu’exposer leurs corps ainsi est la bonne voie à suivre, les réseaux sociaux leur bouffent le cerveau et les coupent de l’enfance définitivement. Et pourtant, elles sont bien des enfants, elles rient, crient, jouent, se gavent de bonbons, pleurent. Mais nous avons gâché leur enfance en laissant faire ce monde ignoble. La finale du concours de danse — concours de danse à placer dans la même benne à ordures que les réseaux sociaux and co puisqu’il fait monter à la tête de ces jeunes filles qu’elles doivent respirer le sexe pour exister — soulève une dernière fois l’estomac dans une séquence qui restera longtemps dans les mémoires pour la gêne incroyable qu’elle provoque. On ne veut que sortir de la salle pour ne plus voir. La décadence de la société résumée en paillettes bleues et en twerks. Immonde.
Je n’ai pas encore pris le temps de parler de la Réalisation et de l’Image, je me suis perdue dans ma rage contre ces moulins à vent que sont toutes les entités qui espèrent asservir les femmes, mais il est évident que Maimouna Doucouré sait manier la caméra (je pleure un peu car il n’y a aucune scripte au générique, erreur de débutant dirons-nous, ou manque de budget). Le montage est simple et efficace, le choix des couleurs criardes et acidulées augmente l’aspect superficiel de ces jeunes filles, et la composition des scènes est toujours juste. On retiendra notamment celle qui montre Ami cachée sous le lit de sa mère qui passe un coup de fil important, magistrale. Un premier film qui annonce, si l’envie lui en prend, une belle carrière et des plans magnifiques en perspectives.
En conclusion, je tiens à dire qu’il est évident que ce film ne fait pas l’apologie de l’hypersexualisation, ni même qu’il pousse les jeunes à se détacher de leurs coutumes et religions pour s’émanciper. Le message du film est clair et limpide : il y a un problème féministe en France. Ce ne sont plus que les femmes adultes qui sont rabaissées au rang d’objet sexuel, ce sont maintenant aussi les gamines.