C'est toute l'Amérique qui passe devant la caméra de Paul Thomas Anderson lorsqu'il réalise Licorice Pizza, celle des années 1970 qui a des résonances avec le passé et le présent, les images du way of life californien, sa chaleur, mais surtout sa jeunesse.
Quatre années après le brillant Phantom Thread, PTA braque cette fois-ci sa caméra sur la jeunesse californienne et, dès le début, on reconnaît son style, avec cette superbe introduction sublimée par un travelling parfaitement maîtrisé. Dès cette scène, la rencontre des deux protagonistes, il y a une fraicheur qui se dégage de l'écran, c'est simple et l'alchimie entre les comédiens se ressent dès les premières secondes. Ces deux-là ont envie de s'évader, PTA aussi, et il le fait ressentir.
D'un côté un jeune ado autonome malgré une mère pensant plutôt à l'appât du gain, qui court les plateaux de télévisions ou de cinéma, et de l'autre une femme de dix ans son ainé, coincée dans une famille (hilarante !) juive, mais rêvant d'une tout autre vie. La relation qui va naître va surtout être tourmentée bien que fusionnelle et surtout atypique. C'est le fil conducteur de Licorice Pizza et PTA va l'entourer de bien des péripéties, des personnages tout aussi atypiques, parfois bien barges même, une atmosphère totalement prenante, parfois envoutante, d'autre fois candide, ainsi que d'ingrédients savoureux.
Ces ingrédients prennent plusieurs formes, allant de la bande originale à des lieux ou des références, comme en témoigne Jack (William) Holden, et ce n'est pas toujours flatteur, ainsi qu'une nostalgie déjà présente dans les années 1970, comme le montrait déjà Lucas avec son American Graffiti. Regard critique sur Hollywood et surtout les personnalités qui y sont, et la folie qui y est imprégnée, Licorice Pizza, bien qu'ouvrant plusieurs pistes scénaristiques, ne s'éloigne jamais vraiment du parcours du couple principal, qu'importe s'il pense surtout à ses flippers ou elle à la politique. Les scènes de quotidien peuvent être drôles, sérieuses ou éprises d'amour ou de folie juvénile, il trouve constamment le bon équilibre entre tout cela, le film étant d'une rare fluidité.
PTA laisse un peu la rigueur de côté, celle qui a fait la réussite de There Will be Blood ou Phantom Thread pour la mêler à la folie chorale de ses premiers films, son cinéma évolue, et magnifiquement. Il a l'art de sublimer les simples moments du quotidien, des séquences d'apparence banales devenant, sous sa caméra, des moments beaux ou poétiques. Comme toujours, il sublime aussi les comédiens qui passent devant sa caméra, de Tom Waits (génial !) à Alana Haim en passant par le jeune Cooper Hoffman, le fils de Philip Seymour, qui avait collaboré 5 fois avec PTA.
Avec Licorice Pizza, Paul Thomas Anderson continue de faire évoluer son cinéma, de sublimer ses personnages en plus de nous immerger dans des années 1970 qu'il met en scène avec un soupçon de mélancolie, beaucoup de fraicheurs, un côté candide et amoureux, et surtout avec talent, un immense talent.