Après « L’île au trésor », séduisant documentaire se déroulant tout entier à la base de loisirs de Cergy-Pontoise, voici la fiction ou plutôt les fictions, car le film se subdivise en deux parties distinctes. Le titre rappelle irrésistiblement Éric Rohmer, qui s’était plu à tourner, parmi son abondante filmographie, quatre films se référant à chacune des quatre saisons. Manifestement donc, Guillaume Brac a voulu rendre hommage à son illustre aîné, tout en ne se départant pas d’une nécessaire modestie : « juillet est le tiers d’un été », rappelle-t-il, sans doute pour indiquer qu’il ne cherche pas à rivaliser avec le réalisateur de « Conte d’été » (1996).
De fait, les deux sketches qui composent « Contes de juillet » n’ont rien de spectaculaire, ils se contentent de raconter une journée parmi d’autres de quelques personnages durant le mois de juillet de 2016. S’il s’agissait de littérature, ce serait deux nouvelles, deux courts récits d’apparence très simple, mais qui, comme dans les meilleures histoires de cette sorte, révèleraient, l’air de rien, bien des subtilités. Et c’est ce que réussit parfaitement Guillaume Brac, preuve, s’il est besoin, qu’on peut faire de l’excellent cinéma sans s’encombrer de gros moyens.
Dans le premier sketch, « L’Amie du dimanche », le réalisateur raconte la sortie de deux collègues de travail se proposant de passer une journée de détente à la base de loisirs de Cergy-Pontoise. Mais, une fois sur place, les choses se gâtent, l’une des filles se laissant séduire assez facilement par un agent de sécurité qui lui promet la visite de quelques endroits secrets du parc après sa fermeture, l’autre fille se sentant délaissée et décidant de partir de son côté pour, en fin de compte, faire, elle aussi, une rencontre, celle d’un garçon qui s’entraîne à l’escrime.
Dans le deuxième sketch, c’est Hanne, une étudiante norvégienne, qui vit sa dernière journée à Paris avant son retour au pays. Cela se passe le 14 juillet. La jeune fille veut profiter de cette journée de fête, mais ses projets se trouvent perturbés par des garçons séducteurs (un collègue étudiant italien et un aguicheur qui s’était mis à la suivre tandis qu’elle essayait d’apercevoir le défilé des troupes). À ces deux-là, viennent s’ajouter, au cours du film, une étudiante en physique quantique et un pompier appelé à la rescousse, suite à une altercation entre les deux galants.
Si, dans « L’île au trésor », Guillaume Brac faisait la part belle à la joie de vivre et exaltait l’esprit d’enfance, il donne à ces deux sketches un contenu plus mélancolique, voire plus grave. Tous les protagonistes qui s’y croisent aspirent, eux aussi, à la joie de vivre, sans nul doute, et il leur arrive de s’y adonner. Cependant, leurs maladresses, et parfois même leurs goujateries, détériorent toujours, au bout du compte, l’esprit de fête. Il faut d’ailleurs remarquer que c’est, le plus souvent, du côté des garçons que surgissent les balourdises et les impudences. Mine de rien, avec ses histoires toutes simples et limpides, Guillaume Brac suggère avec habileté les dissemblances et les incompréhensions qui finissent, presque fatalement, par éloigner les êtres les uns des autres. Comme il est facile de se mentir à soi-même et de tromper (ou de chercher à tromper) les autres ! Et comme c’est dur, comme c’est triste et insupportable, d’entendre à la radio, au soir du 14 juillet 2016, l’annonce de l’attentat de Nice qui a anéanti l’esprit de fête ! Dans ces moments-là, il n’y a plus qu’à pleurer !