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    Les Bienheureux
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    Bernard D.
    Bernard D.

    111 abonnés 613 critiques Suivre son activité

    2,5
    Publiée le 14 janvier 2018
    « Les bienheureux » de Sofia Djama est pour ma part difficile à cerner. Ce film se déroule en 2008 donc 20 ans après la guerre civile, et il met en parallèle un couple et leur fils et sa bande de copains.
    Samir est un Médecin qui par conviction pratique des avortements clandestins mais espère pouvoir monter une petite clinique. Amal, son épouse, est professeure à la fac mais désabusée et regrette de ne pas avoir quitté le pays … Tous 2 sont restés par foi en leur pays avec l’espoir d’un réel changement (cf. la scène de la chanson de Léo Ferré sur le poème d’Aragon) mais ce couple reste très amer de cette révolution ratée qui n’a pas fait émerger ce pays où les femmes n’ont pas le droit d’aller au comptoir ou de boire du vin pour fêter au restaurant leurs 20 ans de mariage, belle métaphore au passage. Ce pays où malgré tout l’alcool et la drogue font des ravages, ce pays où la police est omniprésente … Comme le dit Amal « on n’a pas combattu … on a survécu comme des rats » ou bien encore « on a mené une vie d’hypocrites pour éviter le pire » c.a.d. être tué ou égorgé par les islamistes. Le couple se déchire sur leur fils Fahim qui n’est pas très brillant et que sa mère voudrait pourtant envoyer en Europe pour lui donner plus de chances alors que son père – Samir – pense qu’il doit mener la vie dont il a envie et donc rester en Algérie.
    Fahim est oisif et côtoie beaucoup Reda qui oscille entre le « punk halal », l’alcool et les pétards, et l’islam soufiste au point de se faire tatouer une sourate sur le dos. Accompagnant ces adolescents de 18 ans, Feriel est une jeune fille « lobotomisée par la société capitaliste » selon les propos de Rada est plus soucieuse d’une vie à l’européenne (et on en apprendra le pourquoi) mais elle reste sous le contrôle de son père dont l’épouse a été égorgée et qui est de fait figé dans son passé, et de son frère qui la rackette mais épaulée par son oncle, un policier assez haut placé mais lui aussi blasé par la situation actuelle de son pays.
    La confrontation entre le mode/projet de vie de ces jeunes au sein d’une société qui nous parait répressive et la vie passée/actuelle des quinquagénaires progressistes à l’époque aurait pu être intéressante mais le début du film est très lent et surtout très « brouillon » ! On a bien du mal à comprendre ce vers quoi Sofia Djama veut aller … alors que la fin du film est plutôt bien mené avec pour ma part une dernière scène sublime : la vue d’Alger la blanche obturée par le rideau que referme Amal désespérée.
    VILLE.G
    VILLE.G

    55 abonnés 664 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 8 janvier 2018
    Film étonnant qui dresse un portrait tout en finesse d'une facette de l'Algérie d'aujourd'hui et met en avant des problématiques inconnues (de moi en tout les cas).
    Beaucoup de sujets sont évoqués simplement autour d'une famille de notable et de son entourage.
    C'est quand même assez inquiétant.
    Très bien fait et intéressant.
    TAOURIT N
    TAOURIT N

    2 critiques Suivre son activité

    1,0
    Publiée le 28 décembre 2017
    Une véritable catastrophe !
    Si vous êtes déprimés n’allez surtout pas voir ce film, il est plus que déprimant !
    Un film plat sans aucun rebond on attend en suspens mais rien ne se passe. ...
    J’ai bien failli quitter la salle, mais j’ai préféré attendre de voir si quelque chose allait se passer… J’ai quand même tenté de comprendre ce que voulait véhiculer la réalisatrice.
    Constat :Rien c’est vide c’est creux sans aucun intérêt

    Ce film ne représente absolument pas l’Algérie que je connais… Les extrêmes : islamistes extrémistes ou bien c’est la débauche complète alcool à flot cigarettes cannabis, Avortement clandestin… Corruption,
    Les dialogues sont complètement vide, sans aucun intérêt. Il n’y a pas de fil conducteur.
    les acteurs sont mis en scène systématiquement en train de fumer de boire ou de dire des choses complètement abject.
    Heureusement que les Algériens modérés ne passent pas leur temps à fumer boire et leurs enfants ne sont pas des fumeurs de shit, des débauchés.
    Pour la plupart ils font de réelles études, Le niveau intellectuel est bien plus élevé que celui que veut nous démontrer ce malheureux film.

    Beaucoup d’ambiguïté dans ce film les Algériens ne sont pas dans les extrêmes, absolument pas !
    Je trouve regrettable de donner cette image à l’Algérie et aux Algériens.
    Pour tous ceux qui vont se fier à ce film Pour fonder leur jugement, je vous conseille vivement de chercher d’autres sources c’est une véritable honte de permettre ce genre de stéréotypes.
    titicaca120
    titicaca120

    383 abonnés 2 179 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 22 décembre 2017
    20 ans après la fin de la guerre civile nous sommes donc en 2008
    et les blessures sont encore vives.
    nous nous immisçons dans la vie d'une famille émancipée
    et nous suivons leur quotidien.
    Alger et parfaitement filmé et les acteurs tous impliqués nous offrent
    un très beau film sans cliché et avec des moments émouvants.
    une mention spéciale pour Nadia Kaci et Lyna Khoudri que j'ai trouvé
    flamboyantes.
    missfanfan
    missfanfan

    87 abonnés 849 critiques Suivre son activité

    3,0
    Publiée le 21 décembre 2017
    Sami Bouajila est comme toujours excellent , l'histoire tourne un peu en rond et quelques situations pas très crédibles surtout en Algérie
    la petit n'est pas triste plus que ça elle fume s'habille un brin provoquante drague un peu son ami policier
    on s'en ces jeunes désoeuvrés qui tournes en rond ne savent pas quoi faire de leurs vies et les adultes dépassés la femme qui évite la prison après avoir trop bu je m'interroge également
    Yves G.
    Yves G.

    1 454 abonnés 3 480 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 21 décembre 2017
    À Alger en 2008, Amal et Samir s'apprêtent à fêter leurs vingt ans de mariage. L'enthousiasme de leur jeunesse a été mis à mal par la guerre civile et par la chape de plomb qui s'est abattue sur l'Algérie. Ils s'opposent sur l'avenir de leur fils Fahim : Amal voudrait qu'il parte étudier à l'étranger mais Samir veut qu'il reste en Algérie.
    Pendant ce temps, Fahim traîne son ennui dans la nuit algéroise en compagnie de deux amis : Reda qui a décidé de se faire tatouer une sourate du Coran et Feriel qui n'arrive pas à faire le deuil de sa mère disparue durant les événements.

    Le récit entrelace l'histoire de deux soirées : celle des adultes - qui cherchent en vain un restaurant pour fêter leur anniversaire de mariage, métaphore d'une Algérie incapable d'offrir à ses ressortissants un cadre hospitalier, et celle des adolescents qui vont écouter du taqwacore, du hard rock à la sauce musulmane.

    Le premier film de Sofia Djama est déchirant. Il fait le constat désabusé, comme tant d'autres films algériens dont on peut s'étonner qu'ils n'aient pas été frappés par la censure ("En attendant les hirondelles", "À mon âge je me cache encore pour fumer", "Les Terrasses") , d'une société algérienne en panne. Une société qui ne parvient pas à refermer les plaies béantes de la guerre civile. Une société soi-disant laïque où la bigoterie impose ses règles humiliantes. Une société que ses aînés, condamnés au cynisme, ont perdu tout espoir de réformer. Une société qui n'offre plus d'espoirs à ses enfants sinon celui de l'exil pour aller étudier dans des universités dignes de ce nom et mener une vie libre, sans hypocrisie ni compromission.

    La charge est lourde. Elle pourrait être écrasante. Mais, grâce à la fluidité de son écriture et à la qualité des acteurs, "Les Bienheureux" évite le piège du procès à charge. Car ses personnages ne se réduisent pas à des caricatures. Amal (Nadia Kaci qu'on avait déjà vu dans les films de Nadir Moknèche mais dont le talent gagnerait à s'exporter de l'autre côté de la Méditerranée) et Samir (Sami Bouajila toujours aussi solide) forment un couple de bobos très crédibles. Ce médecin, qui pratique des avortements sous le manteau, et cette professeure ont rêvé d'une vie heureuse. La cinquantaine approchant, l'heure des bilans a sonné pour eux. Alors qu'ils s'aiment encore, ils réalisent que leur vie a été un échec et que leur couple suit le même chemin. Leur fils unique est leur plus grande fierté, mais aussi leur plus grande déception (c'est un étudiant dilettante) et leur plus grande inquiétude (quel avenir peut-il espérer en Algérie ?).
    anonyme
    Un visiteur
    4,0
    Publiée le 18 décembre 2017
    Bon film.
    La réalisatrice dépeint une société algérienne fermée sans pour autant tomber dans les facilités que l'on peut par moment redouter.
    poet75
    poet75

    270 abonnés 703 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 18 décembre 2017
    Avec son premier long-métrage, la jeune réalisatrice Sofia Djama fait le choix de radiographier la réalité complexe de son propre pays, l’Algérie, et en particulier de la ville d’Alger. Pour ce faire, elle place l’action du film en 2008, au lendemain de ce qu’on a appelé la décennie noire qui a vu se déchaîner la violence dans le pays. Les choses se sont certes apaisées, nous montre la cinéaste, mais les stigmates sont bien là et il vaut mieux rester encore prudent. Dans un pays comme celui-là, dans une société aussi embrouillée, chacun essaie, comme il le peut, de trouver son chemin de bonheur.
    « Pourquoi ne serais-je pas heureuse, ici, à Alger ? ». C’est précisément la question que pose la jeune Feriel, l’un des personnages du film. La jeune fille a pourtant de bonnes raisons d’en douter puisque sa mère a été assassinée et qu’elle-même porte la cicatrice d’une blessure. Mais non, elle ne veut pas baisser les bras. Malgré les paroles de son père qui l’invite à la méfiance, elle est habitée de la force de vivre.
    Beaucoup d’autres personnages se croisent dans ce film construit plus ou moins comme une œuvre chorale. On y découvre, entre autres, le couple formé par Amal et Samir qui s’apprêtent à fêter leurs vingt ans de mariage. spoiler: Elle est une enseignante et lui un gynécologue qui arrondit ses fins de mois en pratiquant des avortements clandestins. Tous deux se disputent à propos de leur fils que sa mère voudrait bien voir quitter le pays pour mieux se consacrer à ses études mais que son père préfère garder au pays
    . Tous deux sont, à leur façon, des gens de conviction (lors d’une des scènes où il apparaît, Samir chante une version quelque peu arrangée de « L’Affiche Rouge », le poème d’Aragon superbement mis en musique par Léo Ferré), mais ils sont également empêtrés dans leurs propres contradictions. Et, pour ce qui est fêter leur anniversaire de mariage hors de chez eux, cela n’a rien de simple dans un pays qui restreint drastiquement la place des femmes hors du cercle familial.
    spoiler: Quant à Fahim, leur fils, plutôt que de songer à ses études ou à sa carrière, il préfère tuer le temps avec Reda, un garçon tenté par le mysticisme au point qu’il veut se faire tatouer une sourate sur le dos, ainsi qu’avec Feriel. Tous se retrouvent aussi parfois dans un sous-sol squatté par une bande de jeunes de convictions et d’appartenances sociales diverses
    . Par ce moyen, la réalisatrice montre avec finesse les hésitations et les difficiles recherches d’identité des jeunes Algériens. Son premier film est indéniablement prometteur.
    anonyme
    Un visiteur
    4,0
    Publiée le 16 décembre 2017
    Une deuxième belle surprise algérienne après "En attendant les hirondelles" .
    Deux générations au cœur d'Alger dans un milieu plutôt nanti. Un couple fatigué par des années de terreur se déchire autour du départ ou non de leur fils pour étudier en France.
    Trois étudiants , deux garçons, plutôt perdus entre drogue et islamisme ,et une fille qui n'a pas froid aux yeux et veut vivre librement.
    Les dialogues sont justes, les acteurs, amateurs ou professionnels sont excellents.
    Un film que beaucoup de monde devrait voir pour réaliser ce qu'ont vécu les algériens pendant ces 10 années de terreur et les conséquences sur la jeunesse.
    Jean-luc G
    Jean-luc G

    63 abonnés 769 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 17 décembre 2017
    Après « En attendant les Hirondelles » de Moussaoui, le film de Sofia Djama, encore plus jeune que lui, complète le tragique tableau d’un pays, non pas au bord de l’explosion, mais en coma artificiel profond et qui n’arrive pas à sortir de l’état de sidération provoqué par la guerre civile des années 90. On lui pardonnera de légers défauts de scénario, ou de montage. Le fond est solide, la direction d’acteurs sans faille, et la baie d’Alger toujours aussi envoutante. Si Moussaoui a plutôt produit une photo instantanée de la classe moyenne algérienne contemporaine, Djama de son côté raconte un peu plus comment les individus ont vécu la décennie d’horreur qui a conduit à la déliquescence du corps social. Deux générations perdues coexistent, celle qui avait 20 ans en 1988 et ont cru que la démocratie allait arriver, et celle de leurs enfants (pas nombreux, on est à Alger…) pour qui le shit et la religion (!) leur tiennent lieu d’avenir radieux !! Amal et Samir forment un couple proche de notre petite bourgeoisie moyenne, confronté à un choix perdant-perdant, à savoir partir ou rester…. La jeunesse ressemble à la nôtre ou celle émancipée du Maroc, insouciante et touchante, malgré l’image dévalorisante que renvoie leurs parents et les souvenirs des traumatismes encore chauds.
    Le titre est lui-même empreint de cynisme : est-on heureux parce que l’on a survécu aux assassinats aveugles qui ont plombé la vie quotidienne des algériens ? Djama frappe plus fort et nous émeut avec ses tripes ; son témoignage porte parce qu’elle a vécu sur place les années de plomb. En s’appuyant en particulier sur une actrice commune aux deux films, Nadia Kaci, qui méritait tout autant un prix d’interprétation féminine. Une performance que les spectateurs algériens ne sont pas prêts de voir malheureusement.
    Cinema - décembre 2017
    Goéland
    Goéland

    27 abonnés 127 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 16 décembre 2017
    film très intéressant sur la complexité de la société algérienne, ses inhibitions, son désespoir. De jeunes acteurs épatants. Une réussite
    Brigitte T.
    Brigitte T.

    1 critique Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 13 décembre 2017
    Le thème est intéressant, traité avec intelligence. Le film n'est jamais ennuyeux. Alger est bien filmée, tout est très juste, y compris le jeu subtil des acteurs.
    Quelques effets de mode dans le travail de réalisation. L'ensemble est plutôt convaincant;
    traversay1
    traversay1

    3 554 abonnés 4 847 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 13 décembre 2017
    Pourquoi Sofia Djama a t-elle placé l'action de son premier film, Les bienheureux, en 2008 ? Parce que c'est pile 20 ans après la révolution de 1988 en Algérie, lui permettant de tracer des lignes entre deux générations, celle des sympathisants de l'époque, âgés d'une cinquantaine d'années en 2008, et celle qui est née après 1988. Les bienheureux, titre ironique s'il en est, est un film choral qui ne cesse de passer des plus anciens, un couple plus particulièrement, à un groupe de jeunes, en tissant entre eux des liens plus ou moins ténus, avec une interrogation commune : comment continuer à vivre dans un pays qui, après les exactions de la guerre civile, ne semble pas capable de croire en son avenir ? Le film de Sofia Djama est un film éminemment politique, tout en offrant à voir une palette de destins individuels. C'est aussi un portrait amoureux de la ville d'Alger, notamment à travers son étonnante variété architecturale. Très bien écrit, le film pourra sembler languissant à ceux qui n'aiment pas les conversations animées mais, d'un autre côté, il est impossible d'être insensible à cette sorte de sentiment que tout peut arriver à n'importe quel moment, y compris des morts violentes. Les bienheureux est notamment porté par deux actrices remarquables, Lyna Khoudri, qui a obtenu un prix d'interprétation à Venise, et Nadia Kaci, qui aurait encore davantage mérité cette récompense.
    anonyme
    Un visiteur
    4,0
    Publiée le 13 décembre 2017
    Vu en avant première, il y a quelques semaines, j'étais agréablement surprise par "Les bienheureux". Le film se passe en 2008 à Alger, Amal et Samir sont à un tournant de leur histoire de couple, ils s'apprêtent à fêter leur 20 ans de mariage. C'est aussi 20 ans après "la décennie noire" qui avait plongé et isolé les Algériens dans une violence inouïe. 20 ans après, Amal et Samir ne parviennent pas à célébrer un anniversaire. Quelque chose s'est éteint chez Amal, et Samir ne veut rien y voir. C'est peut-être la désillusion qui envahit Amal, l'aveuglement de Samir, la fin d'un espoir ( Amal signifie espoir) ou tout simplement la fin d'un amour. A l'opposé des intérieurs bourgeois où le couple se déchire, il y a l'énergie quotidienne, celle du présent, celle de la vie qui traverse un groupe de jeunes, Fahim leur fils et surtout l'incroyable Feriel, jeune fille qui se démène au milieu des hommes qui l'entourent. Son père qui n'est pas sorti de la tragédie, un ami policier abattu par le malheur, et ses jeunes amis Fahim et Reda. Les hommes se cherchent ou s'enfoncent, Feriel elle, se démène, solaire, courageuse, ironique et presque effrontée, elle vit sa vie, la compose et nous porte avec elle. SI parfois j'ai été lassée par l'histoire "des adultes" empêtrés dans des discussions et des situations qui me paraissent déjà vues, et parfois proches du clichés ( la femme qui boit et les policiers etc...) "Les bienheureux" reste un film subtil qui déroule petit à petit ses enjeux et son ampleur. Il révèle aussi de formidables actrices et acteurs, dirigés avec beaucoup de finesse. Bref, un film inattendu pour moi et à ne pas manquer.
    Olivier Barlet
    Olivier Barlet

    293 abonnés 393 critiques Suivre son activité

    4,5
    Publiée le 12 décembre 2017
    C'est le jour du vingtième anniversaire de mariage d'Amal et Samir mais ils ont bien du mal à trouver l'esprit de la fête. Fahim, leur fils, traîne avec ses amis Feriel et Reda. Situé en 2008, quelques années après cette décennie que l'on hésite encore à appeler guerre civile, Les Bienheureux est un va-et-vient constant entre ces deux générations. Celle des parents, cassés par les années noires, qui survivent à la recherche d'un espoir, et qui voudraient protéger leurs enfants. Et celle des jeunes, travaillés par le désir de vivre mais confrontés au conservatisme rampant, et qui portent aussi les blessures de leurs parents. Dans le contexte rigoureux du contrôle social et idéologique qui se renforce, et réduit l'espace de liberté de tous, les parents cherchent leur voie entre l'ici et l'ailleurs, entre la perte des illusions et la nécessité de faire avec. Quant aux jeunes, ils sont là, et se cherchent dans l'ici et maintenant.
    Les Bienheureux est porté par une pléiade d'acteurs remarquables, à commencer par Nadia Kaci, dont la fêlure guide les pas. Mais dans ce temps court autour d'une nuit dramatique, dans la géographie des ruelles et des grands axes, la cacophonie des artères le jour et la pesanteur du silence la nuit, c'est toute une ville qui est présente, et partant un pays qui se fige dans l'immobilisme.
    Fahim spoiler: n'a que faire des pressions de sa mère pour aller étudier en France
    : sa patrie, c'est là où il a les pieds. Reda vit sa foi comme une poésie, un soufisme que ne peuvent supporter les gardiens de l'obscurantisme. Feriel refuse de se laisser enfermer dans la mélancolie spoiler: malgré le drame qu'a subi sa famille victime des fous de Dieu
    . Chacun à leur manière, ils échappent au contrôle des parents, sans pour autant suivre un chemin tracé. La musique leur offre des lignes de fuite, l'affirmation de soi des voies de résistance. Mais au fond, ils errent dans l'ennui. Ce n'est que lorsqu'ils sortent de leur milieu estudiantin qu'ils trouvent des espaces plus ouverts.
    Amal et Samir, eux, ne sortent jamais de leur voiture, de leur appartement, de leurs restaurants. Ils ne voient la ville que du haut de leur balcon. Avec leurs amis, ils ne parlent que de leur positionnement, de l'indépendance au compromis. Mais jeunes et vieux sont tous confrontés, en toutes circonstances aux blocages et aux accrocs, à l'adversité. C'est ce qui fait à la fois la tension et le récit du film, et inscrit Alger comme lieu des tourments. C'est pourtant au terme de cette nuit que chacun a avancé d'un pas.
    Les Bienheureux est comme une lettre d'une fille à ses parents, de la génération qui avait 20 ans en 2008 à celle qui en avait 40 et qui s'est connu dans la rue lors du "printemps arabe algérien", en 1988, lorsqu'elle-même avait 20 ans, et qu'elle manifestait pour obtenir la démocratie mais dont l'espoir a basculé dans la montée du FIS. C'est une lettre sur un héritage dur à porter. Elle propose en dédicace un appel au dépassement : "A la mémoire de nos parents, qu'elle ne s'égare pas dans l'habitude de leur absence". Comme si les parents, défaits, désunis, ne savaient plus comment connecter avec leurs enfants et leur assurer une présence, comme si les enfants s'habituaient à ne plus chercher leur contact et l'écoute de leur expérience.
    La césure du pays n'est plus dès lors seulement entre une société progressiste et celle qui s'enferre dans le conservatisme religieux, focus de nombre de films et forcément présente ici aussi, mais dans le fossé qui s'est creusé entre deux générations. Les Bienheureux s'affirme ainsi comme un film-constat, dont l'enjeu est de restaurer l'essentiel : la conscience de cette cassure, profonde, intime, gravissime puisque la génération montante ne sait où s'appuyer pour bâtir un avenir.
    Revenir sur les années de plomb est nécessaire pour la génération de Sofia Djama car elles ont affecté toute l'Algérie et qu'on a tendance à vouloir en tirer le sale rideau. En ressasser les drames ne fait rien avancer : c'est dans l'intime et aujourd'hui que se situent les blocages qui en sont issus, c'est dans la mémoire que se logent les noeuds. C'est donc cet après le sujet du film : comment la guerre a profondément changé les individus, et au fond, comment elle les empêche d'aimer et de s'aimer.
    "Bienheureux les miséricordieux car ils obtiendront miséricorde". Le christianisme et l'islam ont notamment en commun de se définir comme religion de la miséricorde. Dans le film de Sofia Djama, chacun fait un pas vers l'autre, sans pour autant renoncer à ce qu'il est. Il ne le fait pas par compassion mais par compromis personnel pour parvenir à la survie. Sans doute dans la simple conscience que le plus important est d'éviter les blocages pour décider de sa vie.
    Sofia Djama porte sur tous ses personnages un regard bienveillant. Samir a toujours la chaleur de Sami Bouajila. Même le journaliste cynique interprété à la perfection par Faouzi Bensaïdi conserve son humanité. Pour incarner Feriel, elle a trouvé en Lyna Khoudri une vitalité frondeuse qui porte le rôle à merveille (elle a d'ailleurs reçu le prix d'interprétation Orizzonti au festival de Venise). Quant à Nadia Kaci, elle est d'emblée située dans la lignée de la solitude et de l'intériorité fuyante de Nahla, dont elle regarde un passage à la télévision, un film culte de Farouk Beloufa (1979) et son unique long métrage de fiction, tourné à Beyrouth dans le tourbillon de la guerre civile libanaise et les incertitudes de l'époque.
    Ce regard sensible et généreux de la caméra, d'un cadre et d'une lumière qui épousent ce qu'expriment les acteurs, cette mise en scène impressionnante de maturité, au service de la pensée autant que du témoignage, cette confiance malgré tout en l'humanité, font de Les Bienheureux un film qui nous concerne tous et qui laisse des traces. (critique d'Olivier Barlet sur le site d'Africultures)
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