Photographe à l’origine, 43 ans au compteur, le romain Dario Albertini est entré par le documentaire dans la réalisation cinématographique. "Il figlio Manuel" est son premier long métrage de fiction. Il a obtenu 3 prix lors du Festival du cinéma méditerranéen de Montpellier 2017, dont deux prix majeurs : l’Antigone d’or, décerné par le Jury, et le Prix de la critique.
Arrivé à l’âge de 18 ans, Manuel doit quitter le centre éducatif dans lequel il avait été placé quand, lui étant mineur, sa mère avait été incarcérée : en Italie, l’aide économique permettant à des jeunes de rester dans de telles institutions s’arrête lorsqu’ils atteignent leur majorité. Cette mère, il ne cessait d’y penser durant son séjour dans l’institution et il avait en tête de faire coïncider dans le temps leur retour à la liberté, à elle et à lui. Pour cela, pour que sa mère puisse être assignée à résidence, en liberté surveillée auprès de lui, il doit arriver à prouver, à sa sortie de l’institution, qu’il est apte à s’en porter garant.
Avec l’histoire de Manuel, Dario Albertini prouve qu’on peut réaliser un film passionnant centré sur un grand adolescent arrivant à l’âge adulte avec un comportement que l’on pourra qualifier, selon sa philosophie personnelle, de raisonnable ou de timoré. Film passionnant car les scénaristes ont fait en sorte que la vie de Manuel ne soit pas un long fleuve tranquille à sa sortie de l’institution : entre cette sortie et le rêve qu’il a en tête, on sent que Manuel est balloté au gré de ses rencontres, dont celle d’un ancien ami venu le visiter pour lui proposer un poste important en Croatie et dont tout laisse à penser qu’il n’est pas très « clean ». Pour le spectateur cela se traduit par un questionnement presque permanent : que va-t-il finalement décider, va-t-il réussir à aller au bout de ce qu’il avait en tête ? Dans ce contexte et sans rien « divulgâcher », on conseillera aux spectateurs de bien regarder la destination d’un autocar pris par Manuel vers la toute fin du film : l’image est fugace, mais, si ce détail vous échappe (et c’est le cas chez une bonne moitié des spectateurs non prévenus), c’est le sens profond du film qui, également, vous aura échappé !
Même si cela fait des années que le cinéma italien est considéré par certains comme étant en état de mort clinique, il ne se passe pas une année sans qu’apparaisse au minimum un nouveau réalisateur prometteur originaire de ce pays qui nous est si proche. Au tour, cette fois-ci, de Dario Albertini. Il vient du monde du documentaire et on n’est donc pas surpris de trouver chez lui des affinités avec le néoréalisme italien, un néoréalisme toutefois modernisé par son croisement avec le cinéma des frères Dardenne et celui de Ken Loach.