Christopher Nolan se montre ambitieux avec son Memento qui tente de réinventer le cinéma. Bon metteur en scène, ce n'est plus à prouver, la mise en scène de ce thriller est ce qui le rend particulier. Deux années avant Irreversible, Nolan tente la mise en scène anti-chronologique, la remontée dans le temps, les conséquences avant les causes. Et avec le scénario pondu par son frère, ça marche. Le héros, interprété par un Guy Pearce pour son meilleur rôle depuis Los Angeles Confidential, est un semi-amnésique qui se souvient de son passé lointain mais qui est incapable de se souvenir du passé proche, celui qui remonte à plus de 15 minutes, et ceci depuis sa blessure au crâne causée le soir du viol/meurtre de sa femme. Celui-ci survie grâce à ses post-its, photos et tatouages sur le corps, qui lui rappellent l'essentiel et lui permettent d'avancer dans sa quête, qui est de venger sa femme. La mise en scène sert à appuyer cette amnésie, sauf que l'on fait le cheminement inverse, en remontant les pensées du heros. Mais ce n'est pas tout. Nolan fait plus fort en mettant en place une histoire parallèle, avec le même héros, qui se déroule cette fois-ci par petites scènes chronologiques, et qui permet d'en apprendre plus sur la personnalité du héros et de son histoire. Un procédé original et passionant, qui malgré que l'on connaisse la fin dès le début, s'avère bien plus prenant et angoissant qu'un déroulement classique, car le doute s'installe autour de manipulations qui nous paraissent de plus en plus évidentes. La fin est superbe,
installant une fois pour toute le doute, la tromperie, la manipulation, et reste très ouverte, presque inachevée
. Cependant ce procédé à aussi ses propres limites : une parfois trop grande complexité, une sensation de tourner en rond, ou encore un scénario presque trop classique une fois mis dans un sens chronologique (mais excusable, il n'aurait peu d’intérêt dans ce sens). Memento reste unique dans son genre, malgré ses défauts, et constitue donc une expérience cinématographique originale.