Tigre&Dragon ou la destinée d'une jeune fille en pleine crise d'adolescence incapable de contrôler ses hormones. Bah, pas de problème après tout, ça nous permet de s'enfiler de magnifiques chorégraphies à l'épée...enfin, c'est tout de même frustrant, tout ce touintouin pour cette sale gamine dépassée par ses pulsions. Bon, je fais un peu le méchant avec Tigre&Dragon, ce qui n'est pas bien, car cette œuvre déborde de sincérité et de bonne volonté. Ce qui ne lui permet clairement pas d'atteindre ses ambitions de grand blockbuster révolutionnaire. Sur le plan technique, peut-être, ma foi, pour l'année de sa sortie, les combats polis au numérique alors en pleine expansion initiée par l'explosion Matrix ont dus impressionner. Aujourd'hui, heu...c'est très rigolo diront nous. Surtout pour un pauvre néophyte en films d'arts martiaux oriental, il faut un temps d'adaptation plutôt long avant de passer du rire mi narquois mi bienveillant au ressenti intense des scènes d'actions. Une fois passé ce cap, on en redemande, et Ang Lee se montre généreux, la dernière demi heure étant chargé de combats jouissifs (dans le restaurant), classiques mais efficaces (le duel de guerrière), et enfin une valse géante dans les bambous qui tient davantage du spectacle de cirque que de séquence cinématographique. Du moins c'est ce que l'on pense au début, car au fond, le cinéma est un spectacle, et si pour un occidental cette ultime fight ressemble à une représentation d'opéra ou de théâtre, ou peu encore sembler similaire à une attraction de parc célèbre, cela ne l’empêche pas d'en profiter, bien au contraire. Surtout que de sublimes mélodies accompagnent ce moment, et le film dans son ensemble, alternant avec des instants de silence où s'exprime la beauté naturelle de la Chine. Les paysages sont magnifiques mais trop mal gérés dans leur « temps de présence à l'écran », très inégal, et trop souvent mis en valeur comme simple toile de fond à l'intrigue. Un scénario d'ailleurs relativement correct, très prévisible mais ayant la bonté de faire intervenir divers éléments de contexte historique : les façons de vivre aristocrates – pauvres, les mariages forcés, la notion d'honneur familiale...on repère également dans les décors tout un tas de détails de reconstitution tels des sortes de sillons creusés dans les rues pavés pour permettre le passage des charrettes ou la calligraphie qui font parfois passer ce fameux Tigre&Dragon pour...un fameux documentaire. Ce qui n'est pas un reproche, mais qui ne cadre qu'à moitié avec l'ouragan d'action hallucinant promis. On est loin de ressentir le moindre frisson épique. Tout ces tournoiements de lames sont jolis, virtuoses, plaisants à regarder, pleins de grâce et de charme, mais ne suscitent que de très légères émotions. Ces dernières sont davantage présentes dans le jeu des acteurs qui jouent convenablement, avec Michelle Yeoh et Chow Yun-Fat admirables qui sont franchement très supérieurs à tout les autres, surtout ces agaçants Chang Chen et Zhang Ziyi. Toute cette trame pas plus lourde qu'une plume (même si bien au dessus de tout blockbuster américain typique) finit en drame et là aussi, c'est un bon point. Pas de retournement de situations qui permet de sauver un protagoniste pour clore l’œuvre sur une happy end de mauvais goût. Une fin simple et magique. Tigre&Dragon n'est pas la claque monstrueuse dont les critiques parlent, c'est un poème chinois qui parle de son pays, ni petit ni très grand, tout simplement agréable.