Je n'ai pas vu le premier film d'Alex Lutz en tant que cinéaste, et, franchement, je ne pense pas le regarder un jour. Son second, en revanche, m'intéressait bien plus. J'aimais bien l'idée de faire un documentaire sur un chanteur fictif. Ça fait appel à l'imagination. Tout est à créer : les chansons, les relations, les concerts, la carrière, tout quoi. A travers ce "Guy", Lutz rend un hommage sincère à la variété et plus généralement à la chanson française. Déjà, Guy Jamet, à son époque de gloire, la trentaine bien tapée, rappelle fortement Claude François. Même si ce dernier se fait tacler au début. Moi, ça me plaît bien. Car, je fais partie des personnes qui sont révulsées dès lors qu'elles entendent ce nom. Ensuite, la présence, notamment de Julien Clerc parmi les guest-stars ne fait que donner plus d'ampleur à cet hommage. Ensuite, il y a ce passage de concert où est reprise la chanson "Je reviendrai à Montréal" de Robert Charlebois. J'ignore si Lutz aime bien les chansons de Charlebois (c'est pas mon cas du tout), mais là, on sent vraiment qu'il voue une affection véritable à celle-ci. Sans oublier les pochettes de disques, d'Hugues Aufray et de Georges Moustaki par exemple. Et, pour en finir, lorsqu'il est vieux, de par sa façon de parler, parfois très crue et balançant des aberrations, Jamet renvoie automatiquement à Gainsbourg, lorsque celui-ci, dans sa période Gainsbarre, se pointait à des émissions de télé dans un état d'ébriété plus qu'avancé. Maintenant, j'en viens au personnage même du chanteur : tu sens que le vieux, faut pas le chatouiller là où ça le chatouille pas, sinon, il se met en rogne très vite. En insultant la terre entière. Il n'est ni sympathique, ni antipathique, mais on s'attache quand même à lui. Car, on est quand même sous le charme de sa franchise. Une franchise qui dénote en cette époque extrêmement aseptisée dans laquelle il ne se retrouve pas. Il est ce qu'il est. Parfois, il dit des conneries plus grosses que lui, mais il est authentique. Ses paroles sortent du coeur. Je voulais parler du GROS point fort du film : la transformation physique d'Alex Lutz. En temps normal, de pareilles transformations, ça ne donne jamais grand chose. Rappelez-vous de Dujardin dans "Un homme à la hauteur" par exemple. C'était vraiment foireux. Mais là, c'est réussi. Et le jeu d'Alex Lutz est vraiment d'enfer. Dans sa gestuelle avec les mains, et dans ce phrasé hélas rendu saccadé par la maladie, on croirait voir Jean-Paul Belmondo, sérieusement. Il y a aussi un autre point fort : même si on en voit que peu, les clips soi-disant d'époque, sont réussis. On y croit. Dans ce film, tout est fictif, mais tout est crédible. Mais bon, il ne faudrait quand même pas occulter ce qui ne va pas. Déjà, il y a un problème de rythme flagrant. Ça ne dure qu'à peine plus d'une heure et demi, mais on y sent vraiment passer. Sur une courte durée comme celle-ci, c'est problématique. Et puis, il y a une certaine redondance dans l'histoire, la vie de ce chanteur devenu has-been manque d'un peu de piment. Cependant, "Guy" vaut vraiment le détour et j'attends de pied ferme le prochain film de notre ami Alex.