La première scène donne le la et nous plonge dans un cauchemar éveillé. On y voit un professeur se suicider par défenestration pendant que sa classe passe un examen. Et c’est par le biais du professeur remplaçant incarné par un Laurent Laffitte impeccable que nous allons pénétrer dans un drôle de monde. Un monde réaliste mais dont les décors parfaitement choisis et l’atmosphère délétère instaurent un climat proche du fantastique. On a l’impression de vivre un cauchemar éveillé, presque comme dans une œuvre de David Lynch. Pour son second film, Sébastien Marnier confirme qu’il est un cinéaste de talent, à suivre, avec une véritable patte et un réel univers artistique. Son thriller implacable avec Marina Foïs, « Irréprochable », avait marqué les esprits. « L’heure de la sortie », certes plus difficile d’accès, devrait faire de même.
Le réalisateur ose un mélange des genres risqué mais tout à fait cohérent, entre l’effroi, l’enquête, l’émotion et un léger sous-texte social. Et tout cela emballé dans un propos écologique fort et pertinent. Rarement la thématique de la fin du monde n’avait été aussi palpable, montrée sous un prisme comme celui de la jeunesse désabusée et suicidaire. La maîtrise à ce niveau est impressionnante, tant au niveau du scénario que de la mise en scène. La musique, le rythme lancinant, des scènes froides et étranges ainsi qu’une symbolique forte comme la chaleur écrasante du soleil conduisent à nous angoisser de manière insidieuse et à nous faire partager le début de folie du personnage principal. D’ailleurs, « L’heure de la sortie » regorge de détails et de signes qu’il nous appartient d’interpréter. En premier lieu le titre, à double voire triple sens, qui prend tout son sens à la fin du film.
Et quelle fin ! Les dernières séquences sont proprement tétanisantes et nous retournent les entrailles. Pourtant pas de gore, ni de scènes choc. Juste des images simples qui nous renvoient à notre propre destruction. Une fin remarquable, pessimiste et nihiliste, qui dénote dans le paysage cinématographique français et fait l’effet d’un choc qui nous occupe l’esprit longtemps après la sortie de la salle. Alors même si le film souffre de quelques maladresses et reste imparfait, il reste mémorable et se positionne comme une œuvre innovante, hors des carcans et des balises propres au cinéma français, qu’il soit d’auteur ou populaire. « L’heure de la sortie » est un film sensoriel, qui met les sens en éveil et doté d’un suspense à tendance écologique fort. C’est rare, et même s’il y a quelques redondances et une dynamique un peu molle en milieu de film, il serait dommage de s’en priver.
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