Un très bon film si je laisse parler mon pur ressenti de spectateur, mais qui soulève quand même quelques réflexions et a de quoi laisser perplexe si on prend en compte sa réception critique et son contexte. Cette satyre ultra-trash, ultra-violente, sans aucune empathie pour aucun de ses personnages, est très bien menée tant du point de vue du scénario (quelques longueurs mais une cohérence impeccable si on le prend dans son ensemble), que de la mise en scène et des choix artistiques. Je ne me suis pas ennuyé une seconde. Si j'excepte, comme beaucoup d'autres, un abus du scatologique dans la 2ème partie sur le yacht, je n'ai rien à redire sur la forme. Sur le fond, celà étant, on peut se demander légitimement si un tel étalage cynique à l'écran a vraiment pour but de dénoncer la pourriture intérieure des ultra-riches, d'éveiller les consciences des dominés sur l'ignominie de ceux qui les exploitent, ou s'il s'agit seulement, comme pour les bonnes vieilles comédies de Molière, de permettre à des spectateurs avertis, cultivés, plutôt à l'aise financièrement de rire de leur propre caricature pour une catharsis qui leur permet ensuite de reprendre leur rôle d'exploiteurs égoïstes sans mauvaise conscience...Une impression d'autant plus gênante qu'elle me rappelle celle que m'avait laissé une autre toute récente palme d'or, Parasite de Bong-Joon-Ho. Que penser, au fond, du fait que l'on porte aux nues des films où les pauvres sont méchants et malins, face à des riches méchants et bêtes ? Qu'est-ce qu'on promeut comme rôle social du cinéma derrière tout ça ? Toutes questions qui font, de mon point de vue, de Sans Filtre une sorte de plaisir coupable pour petit-bourgeois intellectuel de gauche. On peut soit l'accepter, et noter le film 4 ou 5/5, soit le refuser, comme beaucoup ont pu légitimement le faire, et lui coller un 1/5...