Eh bien, c'est la semaine des petites filles abusées. Après ces deux films (totalement différents par ailleurs) on ne pourra pas dire qu'on ne savait pas....
Odette, comme la reine des cygnes blancs du Bal des Cygnes, (l'exquise, la poétique petite Cyrille Mairesse) est une petite fille -fille unique- à qui tout sourit, qui aime dessiner, qui aime la danse, qui rêve d'intégrer le Conservatoire de danse de Paris -où elle est acceptée d'ailleurs. (Ariane Ascaride campe une incroyable prof passionnée par son métier, mais totalement dépourvue d'autorité!). Jusqu'au jour où Gilbert (Pierre Deladonchamps, décidément spécialiste des rôles..... difficiles!), le meilleur ami de la famille, le pote qui est tout le temps là (lui même père de trois garçons) l'entraîne dans la salle de bain pour jouer à la poupée.... et aux chatouilles.
Elle subit, elle ne dit rien, qui la croirait? -et pourtant, si, son père, Fabrice (Clovis Cornillac), qui sera des années plus tard rongé par le remords de n'avoir rien vu, lui aussi, l'aurait écoutée sans doute.... De la mère, Mado, un monstre d'égoïsme (Karin Viard), et qui ne cessera de critiquer ses choix de vie, elle n'a, en effet, rien à attendre.
Elle va grandir avec ça, menant une vie hétéroclite, baises de rencontre, drogues jusqu'au plus dures, mais toujours dansant, tantôt dans des petites troupes, tantôt dans des troupes prestigieuses, parfois réduite à faire des animations ou de la pub, mettant dans la danse toute sa rage impuissante. Je dois dire que je préfère l'Andréa metteur en scène à l'Andréa chorégraphe, ce mélange de gesticulations.... de danse moderne et de hip hop ne me semblant pas très convaincant! Un gentil amoureux (Gregory Montel)? Elle n'est pas prête à ça, il y a sa honte, comme un fardeau....
Jusqu'au jour où elle rencontre, presque par hasard, une psy, effrayée d'abord par ce cas bien plus lourd que ceux qu'elle a l'habitude de traiter (Carole Franck) et qui, petit à petit, l'amènera, d'abord, à parler à ses parents, puis à porter plainte... Et à s'accepter....
La mise en scène est époustouflante! les époques se télescopent, la petite Odette prend parfois la place de la grande Odette (Andréa Bescond), elle s'envole dans la classe de danse sans que cela n'étonne personne, Noureev sort de son poster pour entraîner la petite fille et danser sur la scène du Palais Garnier, Odette et sa Psy se retrouvent devisant dans les endroits invraisemblables.... Le temps, l'espace sont allègrement bouleversés. Cela donne au film énormément de dynamisme, d'originalité, de vitalité, là où une dramatique TV aurait produit un mélo pleurnichard..... Et c'est une belle leçon de résilience: on s'en sort, à partir du moment où on accepte de nommer les choses et de les regarder en face