Quand on a un de ses proches, victime d’un AVC, qui a évolué en Locked-in syndrome (cf. Le scaphandre et le papillon de Jean Dominique Bauby) , ce n’est pas vraiment le film que l’on a envie de voir…et puis au journal télévisé, j’ai vu une interview croisée de Fabrice Luchini et Christian Streiff qui parlaient sereinement, l’un de son vécu, l’autre de son interprétation…c’est ce qui m’a conduit à voir le film que Hervé Mimram a tiré du livre de Christian Streiff, « J’étais un homme pressé »….Christian Streiff , major de l’Ecole des Mines de Paris, est un grand patron qui a commencé sa carrière au groupe Saint Gobain Pont–à-Mousson dont il deviendra directeur de branche puis membre du comité directeur, après un bref passage à EADS comme président exécutif d’Airbus, il entre en février 2007 chez PSA Peugeot Citroën où il est nommé président du directoire…En mai 2008, un premier accident vasculaire le contraint à quitter pendant plus d’un mois sa présidence…malgré son désir de reprendre et après une tentative de reprise trop prématurée de reprise de fonction en 2009, la famille Peugeot est contrainte de le remplacer en juin 2009. Christian Streiff mettra 3 ans à se reconstruire, avec l’aide d’un orthophoniste et le soutien de ses proches…L’AVC a touché la zone du langage et c’est à cette reconstruction du langage que nous assistons…Pour un film où le langage tient une place si prépondérante , qui d’autre que Fabrice Luchini, l’amoureux des mots et des lettres pour interpréter Alain , grand patron de l’industrie automobile, toujours entre deux avions, deux rendez-vous, pour qui secrétaire et chauffeur sont transparents, qui ne voit pas grandir sa fille unique, laquelle lui reprochera de ne pas avoir été présent à la mort de sa femme (Christian Streiff avoue de pas se reconnaitre dans cette image de monarque irascible)…Fabrice Luchini porte à lui tout seul le film…et il le fait sans cabotiner…la dysphasie provoqué par l’AVC lui donne l’occasion de se livrer à quelques envolées sans queue ni tête, d’une drôlerie irrésistible, même si c’est parfois un rire jaune !!! Hervé Mimram a voulu faire une comédie et certains traits ont été forcés…encore que…je connais un brancardier qui par ses extravagances arrive à faire rire ses malades, comme ce fantasque Vincent interprété par Igor Gotesman…ou cette incroyable cuisinière, Violette jouée par Clémence Massart …qui dorlote les animaux avant de les passer à la casserole…je suis moins convaincu par l’interprétation de Leïla Bekhti que j’ai connue plus inspirée, en Jeanne, gentille orthophoniste parfois un peu retors dont on ne voit pas ce qu’apporte au film son histoire de recherche de mère biologique…
En conclusion, Un homme pressé est un film bienveillant et tendre où la prestation de Fabrice Luchini est pour beaucoup…et nous fait oublier les bons sentiments largement envahissants d’un scénario où la rédemption finale est largement prévisible…
Mais quand on sait que les AVC font 30000 morts chaque année en France et que tous ne s’en sortent pas aussi bien que Christian Streiff, on retiendra le message du film…Prenons le temps de vivre…