Je reconnais au film une certaine efficacité formelle. La mise en scène est bien maîtrisée. En tant qu'ancien sous-marinier SNA et SNLE, je trouve que les ambiances opérationnelles sont assez bien rendues, avec des mots techniques et un "jargon" juste. Je passe sur certaines inventions assez SF.
Ce que je trouve, par contre, complètement fantaisiste c'est les relations entre les personnages. Je suppose qu'il fallait rendre les protagonistes plus "humains" (dans le mauvais sens, stéréotypés).
Les rapports entre gens de grades différents ou de même grade sont très faux.
Vous pouvez penser que je chipote et qu'il en est toujours ainsi quand on regarde une fiction qui porte sur un domaine que l'on connaît très bien, mais je suis convaincu que l'efficacité du film aurait gagné si cet aspect avait été plus simplement proche de la réalité. J'y vois un manque de perspicacité de la réalisation.
Ainsi, par exemple :
- Chanteraide est premier-maître, donc cadre (on l'apprend bien plus tard). On ne parle pas à un cadre comme on le voit dans le film un peu tout le temps et typiquement durant les premières minutes. Ainsi son chef de PC sonar a le même grade que lui, voire juste inférieur (ce qui est possible car Chanteraide est un spécialiste) ou à peine supérieur, et
il lui parle sans respect, comme on parlerait, je dis TRÈS MAL, à un matelot.
- Le commandant du CIRA qui le reçoit ensuite, lui manque, aussi, totalement de respect.
En règle générale, les gens sont bien plus bienveillants entre eux dans la réalité. Cette bienveillance (sincère ou fausse, mais usuelle et manifestée) aurait pu être un excellent ressort dramatique. Le coup du commandant psychorigide, plus militaire qu'un militaire, et qui rabroue violemment l'auteur d'une erreur d'interprétation en en appelant à ce qu'est l'armée "en vrai" est un peu risible.
- Les commandants (et seconds) des bâtiments ne sont pas assez bien campés. Il y a toujours une distance à la fois plus grande et plus subtile que ce que le film montre entre eux et les membres d'équipage. Une distance qui n'empêche pas de se dire des choses cash, comme de manifester amitié, confiance, défiance, etc, mais une distance quand même. Là aussi, un ressort dramatique a été gâché.
- Le test de Chanteraide,
dans la salle avec deux commandants et un amiral qui y assistent. Mouais, bof. De la SF, au même titre que les réponses d'une précision "magiques" de Chanteraide au test.
- Au passage, on aurait pu expliquer à Omar Sy comment saluent les militaires Français, pas les américains.
Je n'ai pas eu l'impression d'avoir eu à faire à des militaires mais à des civils déguisés. C'est un peu dommage, car un travail excellent a par ailleurs été fourni sur beaucoup d'aspects de la sous-marinade. Cette absence de profondeur (c'est le cas de dire) sur l'aspect particulier des grades et des rapports humains m'a beaucoup déçu.
On voulait faire du héro un cador incompris, torturé et injustement dénigré. Ce n'est que cet aspect que le réalisateur a voulu soigner. Pas davantage.
Encore une fois, ce que je dis, sans je l'espère vous donner l'impression de refaire le film, c'est que "Le chant du loup" aurait pu gagner en intensité. La moitié du travail a été fourni. Refuser l'obstacle de la subtilité dans les rapports humains n'est pas souvent un bon choix.
À part ça, ça se regarde comme un Bruce Willis.