S'inscrivant dans le Dogme, mouvement d'obédience néoréaliste lancé telle une boutade d'ivrognes par Lars Von Trier, Julien Donkey-Boy, Harmony Korine oblige, se détache des Danois Von Trier, Bier et Vinterberg, en poussant dans ses retranchements les "règles" établies par Von Trier, privilégiant une recherche plastique transcendantale à un scénario trop imposant. Pourtant, le scénario est là, digne des plus grands films du Free Cinema, donnant la parole aux laissés pour compte, allant même filmer d'authentiques "bêtes de foire" (terme employé en référence au Freaks de Tod Browning, qui avait usé de la même audace à contre sens du conformisme). Korine en profite également pour questionner les différents régimes d'image qui gouvernent la réalisation contemporaine, des images amateurs, au voyeurisme refoulé sous prétexte d'intimité de la circulation, au cinéma plus "mainstream", passant bien évidemment par la démoniaque télévision, au voyeurisme plus flagrant, mais pas pour autant plus assumé. Au final, Korine nous livre un film plutôt cru sur sa réalité underground du monde urbain contemporain. Probablement le plus audacieux des films du Dogme d'un point de vue esthétique (mais aussi scénaristique).