Et si la clef pour comprendre Firestarter, c'était de regarder sa genèse ? À l'origine, c'est un roman de Stephen King donc une aubaine pour les studios de productions (à ce jour, plus de 50 adaptations ont été tirées de ses œuvres). Qu'importe si la nouvelle a déjà été transposée à l'écran en 1984 (sous le titre Charlie), vous avez bien vu que ça ne posait pas de problème pour It, Simetierre ou Carrie. D'un côté, on joue la carte de versions 2.0 fidèles aux textes sacrés tout en brossant dans le sens du poil les fans des films/téléfilms originaux. Sauf qu'ici, le projet a demandé 5 ans d'efforts et vu 2 réalisateurs (Akiva Goldsman et Fatih Akın) jeter l'éponge. On en arrive au point où le film doit exister ne serait-ce que pour limiter la casse d'un point de vue économique. Parce que d'un point de vue artistique, les dommages sont irréparables.
Puisque tout le budget a été grillé dans les différentes phases préparatoires, Keith Thomas doit donc livrer un film au forceps en sabrant des pans entiers de l'histoire au passage. Une intuition ? Non, il suffit de regarder l'introduction qui empilent les expositions sans liens logiques. Au spectateur d'en déduire le fin mot. Ça commence mal, et pourtant on relativiserait presque cet échec au regard de la suite. Absolument rien n'est crédible dans le déroulé. On ne croit jamais à cette situation de traque, à cette cellule familiale écrite n'importe comment, et c'est encore pire pour les autres personnages (Rainbird, d'une tristesse sans nom). À force de caractérisation aberrante, d'effets de manche ridicules (ce craquement de vertèbre) et d'incohérences en pagaille, le petit masochiste en nous accepte le désastre tel qu'il est et choisit d'en rire. En même temps, il y a de quoi.
Même sorti en direct-to-video, Firestarter aurait été raillé pour sa grande pauvreté. On en revient à ce manque de budget, qui bride littéralement tous les départements. La photographie est tellement obscure qu'on doit plisser les yeux et s'approcher de l'écran pour déceler la silhouette ou l'environnement. Le chef op' Karim Hussain n'a probablement trouvé que ce moyen pour dissimuler la misère des décors. Mis à part la séquence tournée dans un gymnase avec une dizaine de figurants, il n'y a jamais de vie nulle part. Et certainement pas dans ce climax situé dans un laboratoire vide où les normes de sécurité sont réduites à trois fois rien. On jubile même à regarder l'attitude engourdie de l'agent de surveillance derrière les moniteurs. Quant aux effets spéciaux, Keith Thomas a au moins eu la décence de la jouer profil bas. Un maquillage sur un corps brûlé fonctionne, tout le reste est simplement redondant dans sa médiocrité.
Pour être charitable, je donnerai un bon point à certaines compositions de John Carpenter, Cody Carpenter et Daniel Davies. Et je ne tiendrai pas trop rigueur de ce film à Zac Efron (correct) ou la jeune Ryan Kiera Armstrong. Que pouvaient-ils faire dans des conditions aussi précaires ? Il est certain qu'on ne gardera pas trace de cette variante, assemblée sans passion comme on accomplit une formalité administrative. D'un écrit dense et tordu, Blumhouse et Keith Thomas n'en retiennent que le minimum syndical. Il y avait matière à dépasser le film original (pas fameux, de mémoire), à l'inverse Firestarter invite à le réévaluer. Copie carbonisée.