Au grand dam de sa mère (Josiane Balasko), grande actrice qui tombe des nues, Laure Baer (Diane Rouxel), jeune femme de 23 ans, annonce sa décision de s’engager dans la Marine Nationale. Sans doute recherche-t-elle précisément ce qui a fait défaut jusqu’ici dans son éducation, un cadre rigide, des structures, de la discipline, etc. Tout cela, bien évidemment, elle le trouve : la vie militaire, c’est le contraire même de la vie d’artiste que mène sa mère, telle qu’on l’imagine en tout cas. Confiée à l’enseigne de vaisseau Dumont (Corentin Fila), un jeune engagé (dont on découvre, plus tard, qu’il est gay), elle visite les lieux et fait vite connaissance avec le commandant Rivière (Lambert Wilson), celui dont elle dépend, qui lui donne des ordres et à qui elle doit rendre des comptes. Conseillée par Dumont et bien décidée à ne pas se contenter d’une carrière de bureau, la jeune femme, tout à sa détermination et à son audace, demande à intégrer une formation commando, en principe réservée aux hommes. « Vous allez pleurer ! », lui dit le commandant Rivière. « Je ne pleure jamais », lui répond-elle du tac au tac.
Ce film d’Hélène Fillières séduit au moins pour deux raisons. D’une part, à cause du jeu sans faille de Diane Rouxel, une jeune actrice épatante qui a su rendre parfaitement crédible son personnage de femme gouvernée par une inflexible volonté. D’autre part, à cause de la relation qui se noue entre celle-ci et son chef, le commandant Rivière. Malgré les différences d’âge et de fonction qui les séparent, dans ce microcosme hiérarchisé qu’est une base militaire, c’est bel et bien un jeu de séduction qui circule de l’un à l’autre. Bien sûr, engoncés dans le cadre strict de l’armée, tous deux s’obligent à demeurer dans le non-dit. Mais la réalisatrice a su à merveille diriger les acteurs, de manière à rendre perceptible ce qui ne peut se traduire de manière verbale, elle a su insérer des indices, comme par exemple la lecture choisie par Laure Baer, qui se trouve être précisément la lecture de prédilection de son chef (en l’occurrence « Lord Jim », chef d’œuvre de Joseph Conrad), et elle a su rendre compte de l’évolution des personnages, de leurs changements de comportements (la froideur et la dureté de l’aspirant Baer qui lui sont reprochées par son petit ami, par exemple).
Cela étant dit, il faut aussi mentionner les limites, voire les défauts, de ce film, la principale étant la curieuse impression de facilité qui s’en dégage. Certes, la réalisatrice a pris soin de filmer les moments compliqués de son héroïne, les épreuves qu’elle doit subir, les obstacles qu’elle doit franchir, mais, au bout du compte, ce qui domine, c’est une sensation de facilité. L’aspirant Baer est victorieuse, elle a surmonté toutes les adversités, bravo ! C’est tout juste si le film ne donne pas le sentiment d’être un gros clip de promotion de la Marine Nationale se proposant de faire du recrutement. Quelque chose comme « Engagez-vous ! Même si vous devez en baver quelque peu, à force de ténacité et de volonté, vous en ressortirez grandis, fiers de vous, et vous ferez l’honneur de la Nation ! » Les scènes finales, de ce point de vue, m’ont semblé particulièrement peu inspirées et, d’une certaine manière, très racoleuses !