Force est de constater que pour un tout premier film, Franck Dubosc s’en sort de façon tout à fait convaincante. Au vu du pitch et de la bande annonce, le pire était à craindre et bien non, le pire n’est pas au rendez-vous. En tant que réalisateur (et scénariste, et dialoguiste), Dubosc réussit un premier film très honorable, plutôt équilibré, sans pathos, sans temps morts, sans scènes superflues, ou trop attendues, ou trop convenues. Evidemment, il y a quelques petits défauts de jeunesse, inhérents d’ailleurs aux comédies françaises en général :
une happy end un tout petit trop convenue
, un humour souvent efficace mais parfois un peu facile, des dialogues auxquels on ne croit pas forcément, des situations un peu « too much » (le coup de la piscine par exemple), et une musique un tout petit trop présente et uniforme à mon gout. Mais ce sont des péchés de jeunesse, et je les lui pardonne bien volontiers car, dans l’ensemble, son film est étonnamment pudique et respire une sincérité dont je ne l’aurais pas forcément cru capable. Le handicap, c’est un sujet délicat et faire de l’humour dessus encore plus. Je me souviens de la scène d’ouverture de « Bienvenue chez les Ch’tis » qui frôlait le mauvais gout en la matière ! Mais ici, grâce à un scénario malin et subtil, Dubosc réussi sans forcer à trouver le ton qu’il faut : il dédramatise son sujet grâce au personnage lumineux de Florence,
qui est handicapée par sa propre négligence (elle n’est pas une victime)
et qui se moque de son handicap, dans tous les sens du terme. Elle fait du sport, de la musique, elle fait du shopping, elle s’amuse et elle a une vie plus épanouie et plus remplie que beaucoup de valides, et que celle de Jocelyn. Sa personnalité à lui, menteur enfermé dans son propre mensonge, aurait peut-être gagné à être un peu plus fouillé, pourquoi était il fâché avec sa mère, et visiblement pas en très bons termes non plus avec son frère ? Sa réussite professionnelle affichée ressemble plus à une volonté de rupture avec ses origines qu’autre chose. On sent qu’il y a quelque chose à comprendre de sa personnalité et de ses mensonges éhontés, mais ca n’est pas très clair. Sur ce point là, le film n’est pas très lisible. Le scénario n’est pas d’une originalité folle, un menteur qui se retrouve piégé par son propre mensonge et qui ne sait plus comment en sortir, c’est un peu bateau et c’est finalement le point commun de beaucoup de comédies ou de vaudeville depuis bien longtemps. Mais même d’une idée peu originale on peu tirer un bon film et Dubosc nous fait passer un bon moment, drôle mais pas que, touchant mais sans pathos, et on s’en fiche un peu si ça fleure bon les fleurs bleues par moment : il a pris un risque, il réussit son pari et c’est bien de le souligner. Si je voulais comparer cette comédie avec le dernier film de Dany Boon, qui est en salle en même temps, je dirais que « Tout le monde debout » est peut-être moins drôle en terme de comique pur mais plus crédible, plus touchant, plus subtil et au final, plus réussi que « La Ch’tite Famille ». Le casting y est pour beaucoup et dans « Tout le monde debout », Dubosc a eu trois bonnes idées : la première, c’est de donner des seconds rôles savoureux à des comédiens excellents et surtout à Elsa Zylberstein, dont le potentiel comique est probablement sous-estimé par le cinéma français. La deuxième bonne idée le concerne, il a eu la bonne idée de ne pas se singer. Au début, Dubosc fait du Dubosc et c’est un peu énervant mais très vite, dés qu’Alexandra Lamy entre en scène (et ce n’est surement pas un hasard), il rentre dans le rang et il parvient à trouver le ton juste, et il arrête (enfin) de se caricaturer. Et puis l’ultime bonne idée, c’est Alexandra Lamy, lumineuse, magnifique avec son sourire éclatant, elle aussi parfaitement dans le ton du rôle qu’elle incarne : ni trop, ni trop peu. « Tout le monde debout » n’est pas un chef d’œuvre ni même le film de l’année, mais c’est une comédie très réussie, pas prétentieuse, pas malvenue et qui a un message fort: celui de dédramatiser le handicap et de rappeler que quand on croise quelqu’un en fauteuil, on ne voit souvent QUE le fauteuil.