Critique concernant uniquement la version longue
Suite à leurs multiples succès, plusieurs réalisateurs du Nouvel Hollywood ont connu des excès de mégalomanie avec un de leurs projets. Spielberg y a cédé en 1979 avec 1941 et Francis Ford Coppola en 1982 avec Coup de cœur. Mais avant ses deux amis, Martin Scorsese connut cette dérive en 1977 avec son hommage à la comédie musicale : New York, New York.
En effet, forts du succès de Taxi driver, le cinéaste italo-américain et son compère, Robert De Niro, avaient un peu la folie des grandeurs et se sont permis un film à gros budget filmé en studio
(pour en être sûr, il suffit de voir la séquence se déroulant en forêt où les arbres en arrière-plan sont clairement peints ou de regarder celle se déroulant dans un restaurant baignant dans le rouge)
tout en improvisant une grande partie des scènes. Cette technique qui se révéla très coûteuse permit d’obtenir de belles performances d’acteurs notamment du couple formé par De Niro et Liza Minnelli qui fait bénéficier au film de ses talents de comédienne et de chanteuse (il suffit d’écouter ses interprétations sur But the world goes ‘round et New York, New York pour s’en convaincre).
Cependant, le choix de cette dernière rentre également dans la démarche du cinéaste de rendre hommage à la comédie musicale puisqu’elle est la fille d’un des maîtres de celle-ci : Vincente Minnelli.
Même si le film ne s’apparente pas tout à fait au genre dans son style hollywoodien mais plutôt au film musical dans un sens plus large, Scorsese se permet tout de même par l’intermédiaire de la projection du film interprété par Francine, Happy endings, de s’offrir son moment de pure comédie musicale hollywoodienne (on pense aux gros blocs musicaux que l’on peut retrouver dans des films comme Un américain à Paris ou Chantons sous la pluie). De même, il est difficile de ne pas penser aux Hommes préfèrent les blondes quand on voit Minnelli porté une robe rouge proche de celle de Marilyn Monroe ou de ne pas se souvenirs du Chantons sous la pluie quand on entend le morceau You are my lucky star.
Cependant, les hommages de Scorsese au cinéma ne se limite pas à ce genre cinématographique
puisque Jimmy Doyle se fait passer pour un certain Monsieur M.(ichael ?) Powell, ce qui est une référence claire au cinéaste du même nom qui est, au passage, un des mentors de Scorsese
.
Ce dernier ne se réduit pas à faire des hommages mais cherche toujours à exploiter au maximum les possibilités du langage cinématographique sans avoir peur de techniques qui peuvent parfois être considérée comme désuètes (les raccords en volet…). Sa virtuosité apparaît dans sa capacité à livrer des séquences très longues mais passionnantes (la séquence d’ouverture durant presque 20 minutes).
Cela permet ainsi de conserver constamment l’attention sur une histoire d’amour commençant comme une comédie pour virer progressivement au drame qui aurait pu sembler un peu classique dans son déroulement (schéma narratif d’ailleurs repris par La la land quasiment 40 ans plus tard).
Le tout est de plus servi par une excellente bande originale constituée de beaucoup de standards de l’époque du récit mais également de quelques morceaux originaux, à commencer par le célébrissime New York, New York écrit à l’occasion du film.
Ainsi, même si la folie des grandeurs du réalisateur amène une démesure qui sembler trop présente parfois, New York, New York reste un sacré morceau de film musical où Scorsese montre toute la capacité qu’il avait pour aborder le genre. Hélas, le public punira le réalisateur de ses ambitions peut-être un peu exagérées en offrant un échec commercial qui constituera une douche froide pour le réalisateur après le succès rencontré par Taxi driver.