Les années 90-2000 furent, à mon sens, celles du producteur Jerry Bruckheimer, qui a éclaboussé Hollywood de son incroyable flair et a imposé une nouvelle façon de faire du cinéma, à la fois fun et décomplexé, sans jamais négliger l'emphase (dans le bon sens du terme). Décrié par bon nombre de "cinéphiles", Bruckheimer est, pour moi, un bienfaiteur qui a toujours été attentif à ce que ces réalisateurs soignent la forme, la BO et le casting. Est-ce la raison pour laquelle j'ai toujours été plutôt bienveillant vis-à-vis de "60 secondes chrono", qui a, pourtant, connu les foudres de la critique dès sa sortie ? C'est fort possible... Mais, à l'heure où la saga "Fast & Furious" commence à être respecté par la critique, j'avoue avoir de moins en moins honte de faire partie de ceux qui ont aimé le film. Autant éluder immédiatement les questions qui fâchent : certes, on est en droit de s'interroger sur la "moralité" d'un film qui dresse un portrait plutôt flatteur de voleurs de voitures et, certes encore, l'intrigue tient sur un post-it. Pour autant, le film n'entendait pas prétendre à l'Oscar du meilleur scénario. Et puis, le film reste un casse géant répartie sur 100 voitures... soit un postulat de départ, certes pas ébouriffant d'originalité mais qui, comme la plupart des (bons) films de braquage, suscite toujours l'intérêt du spectateur. Aussi, pour peu qu'on laisse son cerveau au vestiaire (ce qui fait du bien parfois), on peut apprécier l'essentiel : l'énergie de la mise en scène de Dominic Sena, qui laissait, alors entendre qu'il pouvait être le nouveau Michael Bay (la suite de sa carrière lui a donné tort). Car, "60 secondes chrono" est, avant tout, un grand moment de fun, certes un peu décérébré, mais plutôt jouissif, qui enquille les bagnoles de rêve (ce qui devrait ravir les amateurs... dont je ne fais pas partie), qui soigne tout particulièrement son rythme et sa BO et qui, petit supplément d'âme, s'offre une galerie de personnages plutôt intéressants. On retrouve, d'ailleurs bien la patte du producteur Bruckheimer qui a offert à son poulain un casting tout simplement extraordinaire... ce qui permet une empathie quasi-instantannée du spectateur. Entre une Angélina Jolie au look inattendu (mais un rôle un peu trop potiche), le vieux roublard Robert Duvall, le jeune Giovanni Ribisi, le détestable Christopher Eccleston, l'excellent Will Patton, l'invraisemblable Vinnie Jones ou encore l'amusant duo de flic composé de Delroy Lindo et Timothy Olyphant, on ne sait plus où donner de la tête. Et ne parlons même pas de Nicolas Cage, énorme comme toujours et qui, plus encore que ses petits camarades, transcende par son interprétation un rôle au final peu écrit. Enfin, "60 secondes chrono" s'autorise quelques moments attendrissants, à commencer par la relation difficile entre le héros et son petit frère, qui l'admire mais qui lui reproche de l'avoir abandonné.
A ce titre, la scène où le jeune Kip apprend les raisons du départ de son frère est une vraie réussite.
Cet arc scénaristique est à l'image du film : pas forcément inédite mais correctement traitée. Cette relation se prolonge, d'ailleurs, à travers la collaboration entre les bandes respectives de chacun de deux frangions, ce qui apporte un petit plus à l'intrigue. Bref, "60 secondes chrono" n'a pas de grandes ambitions artistiques mais reste un divertissement purement jouissif qui n'a pas à rougir de son statut.