Un cartoon adulte, tenté par un “relatif” réalisme visuel et confié à un showrunner ayant déjà une solide expérience en matière de satire, ne pouvait que faire envie, tout comme l’idée azimutée de raconter l’histoire de la fondation de l’Amérique dans un univers où par exemple, George Washington aurait été armé de deux tronçonneuse et Benedict Arnold aurait été un loup-garou...ce qui me permet d’en arriver au premier problème, “local” pourrait-on dire, d’un tel projet: la guerre d’indépendance américaine, quand on est européen, on en connaît au mieux les grandes lignes mais pas nécessairement les détails, les personnages secondaires, les anecdotes et les petites phrases historiques, et on loupe donc de nombreuses références. j’ai par exemple été obligé de googliser Benedict Arnold en vitesse pour découvrir qu’il est, aux Etats-unis, devenu l’équivalent d’un “Judas” dans le langage courant. Ceci dit, il y a dans doute moyen de faire sans, d’autant plus que ‘America, le film’ met le paquet question humour trash et gags bêtes et méchants, à la portée de n’importe quel mammifère évolué…tout en évitant soigneusement de rigoler des sujets considérés comme sensibles en 2020”, c’est là toute la limite du projet. Une autre limite du projet, c’est que, et c’est peu explicable, il n’est pas très drôle. Certes, on passe un moment intéressant à repérer tous les anachronismes volontaires, les appels du pied à la pop-culture contemporaine et les idées quand même bien barrées qui parsèment l’histoire : qu’il s’agisse de bio-cuves de thé pour transformer les patriotes en Anglais bon teint, ou des gigantesques Mechas des forces loyalistes en forme de Big Ben ou de bus londonien...mais qu’il faille en accuser la fibre réaliste des dessins ou que ces touches d’humour soient tout simplement mal amenées, le délire ne fait que rarement mouche, contrairement à la plupart des autres productions d’animation américaines qui se veulent irrévérencieuses et décapantes. A moins que, vu le peu d’enthousiasme que j’avais déjà éprouvé pour le ‘Désenchantée’ de Matt Groening, l’humour ait soudainement changé de génération et m’ait laissé sur le bas-côté ? Et puis, il y a aussi ce truc difficile à définir qui me rend encore plus incapable de rentrer dans l’esprit du machin : en dehors de sa tendance classique à se moquer des travers de l’Amérique et de l’Américain moyen, ‘America, le film’ laisse aussi transparaître aussi une forme de fierté cocardière très premier degré envers ces traits de personnalité (inculte, irréfléchi, beauf, replié sur lui-même et ceux qui lui ressemblent...) et ça, décidément, je n’y arrive pas.