Après toutes les déconvenues récentes, qu’il s’agisse de Gaston Lagaffe ou de Spirou, les adaptations de bande-dessinée “traditionnelles� (Valérian étant donc hors-concours) sont devenues des objets de méfiance et de ricanements et voilà que c’est au tour de leur arrière grand-mère à tous, celle qui a préfiguré à la fois la BD telle qu’on la connaît aujourd’hui et la Ligne Claire popularisée par Hergé, de passer à la casserole. Vu que le personnage est apparu en 1905 dans les pages d’un hebdomadaire pour petites filles, on peut estimer que je ne suis définitivement pas d’une quelconque “Génération Bécassine� : d’ailleurs, j’ai l’impression qu’ils sont tous morts il y a bien longtemps, ceux de la génération Bécassine. A mes yeux, elle est juste un personnage physiquement très reconnaissable dont, pour ce que j’en sais, les principales caractéristiques sont la maladresse et la stupidité de la plouquette qui se retrouve parachutée dans le Beau Monde : logique à une époque où, faute d’avoir déjà découvert les Belges, les Parisiens se rabattaient sur les Bretons. Cette vision semble toutefois réductrice et ce n’est d’ailleurs pas l’image que cette adaptation, confiée pour une fois à un auteur ayant quelques chouettes sorties à son actif et pas à un simple yes-man, souhaite faire passer : Bécassine n’est pas “bête�, tout au plus naïve et candide : elle s’émerveille des prouesses de la technologie de la Belle Epoque mais invente elle-même des dispositifs ingénieux dont elle ne songe pas une minute à tirer le moindre profit financier. Elle fait confiance à sa bonne étoile, ne se démonte pas devant ses échecs, bref, Bécassine est une sorte d’Amélie Poulain de province, en moins irritante. Du coup, il se dégage tout au long du film une douce fantaisie poétique, un optimisme indéfectible, comme une sorte de fantasme d’un monde où tout serait simple et se terminerait en chansons : le même genre d’état d’esprit en fait, sous couvert d’un personnage connu de la culture française, qu’on rencontrait dans de précédents films de Podalydès, dont l’irrésistible ‘Comme un avion’, avec quelques gags visuels et des personnages colorés pour faire bonne mesure et complaire aux enfants.