La grande originalité de Long Shot est d’aborder le couple disparate non comme un problème mais comme un moyen de se raccorder au vulgaire, pris dans son double sens de populaire et de trivial. Ou comment briser tout un tas de cérémonials pompeux qui ne sont supportés, qui ne semblent appréciés, que par un consensus hypocrite de la part de ceux qui s’y adonnent. Le film orchestre la relation entre une grande dame et un petit monsieur habillé en jogging et très grossier ; leur rencontre, adultes, rejoue de manière exagérée et sincère la scène de premier regard, le coup de foudre qui se double d’un trouble, d’une interrogation. L’une est en haut, resplendissante ; l’autre est en bas, anomalie dans un paysage costumé. Néanmoins, et contre toute attente – attente non pas du spectateur, qui se doute de ce qui va arriver, non attente des bonnes mœurs ici représentées –, ces deux personnes vont s’aimer d’un amour passionné, partageant une complicité qui rétablit, au sein d’un monde politique où règnent mondanités et faux-semblants, une forme d’authenticité, une communion dans l’humour et la bêtise. Car la bêtise telle que pratiquée ici est un droit, elle démystifie les rapports d’autorité qui unissent les êtres, élabore un langage commun que chacun peut comprendre. La bêtise subie, elle, est le fait du président, ancienne vedette de la télévision qui rêve de devenir acteur sur grand écran ; elle est le fait de ce Canadien qui corrige ses manières, réapprend à rire pour remonter dans les sondages. Mais surtout, ce que réussit Long Shot relève de l’alchimique : convertir des éjaculations faciales et des discussions autour de positions sexuelles ou d’une diarrhée handicapante en ressorts d’une relation amoureuse charmante, les deux personnages formant un très beau couple de cinéma, certainement aidés par la prestation de leur acteur respectif, Charlize Theron et Seth Rogen. Une comédie drôle et alerte qui sait doser romance, campagne politique et grossièretés.