Basé sur des faits réels survenus dans la Géorgie soviétique de 1983, Hostages s’intéresse au détournement raté d’un vol régional par un groupe de jeunes libertaires, depuis ses préparatifs jusqu’aux conséquences qui marqueront durablement toute une génération. Survenu en 1983, tandis que le Parti Communiste est encore bien en place, ce drame ne connaitra de véritable dénouement qu’à la fin de la Perestroïka, lors de la montée de mouvements nationaux puissants dans la plupart des républiques soviétiques. C’est l’agonie du régime de Moscou, mais le rideau de fer pèse encore de tout son poids. Dans la Géorgie de l’époque, les frontières restent closes et il est quasiment impossible de passer à l’Ouest. C’est dans ce contexte que les jeunes protagonistes du récit se décident à concrétiser leur désir profond de se libérer d’un régime qu’ils finissent par juger absurde.
Rezo Gigineishvili est né à Tbilissi en 1982. Diplômé du prestigieux institut Gerasimov (VGIK), il vit et travaille actuellement entre Moscou et sa Géorgie natale. Encore étudiant, il a travaillé comme réalisateur de 2è équipe sur deux gros succès de Fedor Bondarchuk, Le Neuvième Escadron en 2005 et The Inhabited Island en 2009. Il a réalisé son premier long-métrage, Heat, en 2006. Doté d’un budget de 1,4 million de dollars, celui-ci il a rapporté plus de 15 millions et se classe encore aujourd’hui au sommet du box-office russe. En 2012, Rezo a écrit et réalisé en Géorgie la comédie romantique L’Amour avec accent.
On y trouvait un casting de premier plan venant de Russie, de Géorgie et d’autres pays voisins. Le film fut un succès commercial et connut une suite, Sans Frontières, tournée en 2015 en Géorgie, en Arménie, en Russie et au Kazakhstan. Réalisateur bien établi, Gigineishvili s’oriente désormais vers un cinéma plus personnel, au style exigeant et respectueux du public. Avec Hostages, il se concentre sur des problèmes qui le concernent en tant qu’artiste.
Le réalisateur Rezo Gigineishvili a travaillé avec Lasha Bugadze sur le scénario de Hostages. Auteur de romans et de pièces de théâtre jouées à travers toute l’Europe, les oeuvres de Lasha Bugadze sont traduites dans de nombreuses langues. En 2013, son roman The Sins of the Wolf est nominé au prix du Best European Fiction. En 2015, il obtient le Prix de littérature de l’Union Européenne pour sa version de la pièce de théâtre Lysistrata. Il rejoint le projet Hostages en tant que co-scénariste du réalisateur
Rezo Gigineishvili.
"Hostages traite d’un fait historique, mais celui-ci nous concerne tous. Ce contexte de l’Union Soviétique fait encore écho aujourd’hui, car il met en avant ce qui se passe lorsque l’idée de liberté est simulée. Et lorsque cette liberté n’est pas réelle, que le système vous dicte ce qui est bien et ce qui est mal, des pathologies se développent et mènent à la tragédie, au sens classique du terme."
Le terme “Otages” fait aussi référence au groupe de jeunes du film, pleins de naïveté et de confiance en eux qui rêvent d’une vie à l’Ouest, et plus particulièrement en Amérique. Leur soif d’une existence meilleure dans un monde libre et leur refus d’un quotidien terne sous un régime oppressant les poussent à tenter l’impensable. Suivant un plan méticuleux, le groupe décide de détourner un vol régional à destination de Batoumi, ville située à quelques kilomètres de la Turquie, où ils espèrent effectuer leur premier pas hors des frontières soviétiques. Mais dès lors que l’avion décolle, rien ne se passe comme prévu, et leur plan déraille. Certains des pirates de l’air ne sortiront pas vivants de l’avion tandis que les autres seront arrêtés et traduits devant la justice soviétique lors d’un procès largement médiatisé, tenu juste quelques mois après le drame.
Hostages est une histoire douloureuse, et il a fallu un long temps de maturation pour mettre en place un tel projet. Le réalisateur Rezo Gigineishvili a mené des recherches sans relâche dans les dossiers et les
documents officiels liés à la tragédie. Il a lu des milliers de pages, puisé dans les archives du KGB et interviewé tous les témoins directs de la tragédie. Après plusieurs années d’immersion, il décide brusquement d’arrêter. Son implication émotionnelle et physique dans la tragédie est devenue telle qu’il est nécessaire de marquer une pause, pour prendre du recul.
Une année passe, jusqu’à ce qu’il fasse la rencontre de ceux qui vont devenir les producteurs du film. Réunis tous ensemble avec des amis russes et géorgiens, ils se posent les mêmes questions : Peut-on désormais aborder cette page de notre histoire ? Sommes-nous capables de nous mettre dans la peau de ces idéalistes naïfs, mais aussi de ces passagers terrifiés et de ces parents déboussolés ? Peut-on raviver cet épisode confus et honteux de notre passé commun ?
Le cinéaste géorgien Rezo Gigineishvili revient sur ses motivations pour la réalisation de Hostages :
"Depuis ma plus tendre enfance, j’ai entendu parler de l’histoire que je raconte dans ce film. Tout le monde en Géorgie, ma terre natale qui faisait alors partie de l’Union Soviétique, parlait de ce que l’on appelait “l’affaire des gamins dans l’avion”. J’ai passé tout mon temps libre des sept dernières années à enquêter sur les circonstances de cette tragédie. Nous avons interviewé une centaine de témoins directs ou de gens qui ont vécu l’événement de près, nous avons eu accès aux archives d’état géorgiennes, dans lesquelles nous avons lu les interrogatoires auxquels ont été soumis tous ceux qui ont pris part au détournement.
Notre scénario est basé sur ces documents et ces témoignages. Dans mon approche cinématographique, je ressens de la douleur pour eux tous, les forces spéciales qui ont tenté de sauver les otages, les membres d’équipage qui ont péri, les passagers, et les terroristes amateurs qui ont détourné l’avion parce que leur quotidien était devenu étouffant. Pourtant, leur action demeure injustifiable. Tout ce que l’on peut faire, c’est tenter de comprendre : Nous sommes confrontés à une tragédie classique, où nul n’a raison et nul n’est coupable”."